Grèce : le « rapport de forces peut rapidement changer parce que le système est instable »

Déclaration du bureau politique de l'OKDE-Spartakos, 

membre de la coalition Antarsya.


Si le résultat des élections de janvier exprimait l’espoir (et aussi les illusions) de la classe ouvrière de se débarrasser du mémorandum et de l’austérité par la voie électorale et « un gouvernement de la gauche », les mêmes résultats aux élections du 20 septembre ont un sens bien différent. La victoire et l’affaiblissement très limité de Syriza, quelques semaines après avoir imposé le troisième mémorandum, montre qu’une grande partie des travailleurs pensent que pour le moment il n’y avait pas d’alternative.En même temps la mutation de Syriza en parti gouvernemental avance, après qu'il se soit débarrassé de son aile gauche et des ses liens antérieurs dans les syndicats (pas trop grands faut-il dire !), sans grandes pertes.

Les quartiers ouvriers ont voté encore une fois massivement pour Syriza. Ce n’est pas tant les promesses médiocres et les excuses vagues de Syriza qui les ont persuadés, que leur haine pour la droite, le Pasok et les anciens gouvernements pro-mémorandum. Mais cette haine, bien compréhensible, n’est pas suffisante pour rendre optimistes ces résultats électoraux.

La comparaison formelle des pourcentages de la gauche et de la droite penche pour la première, mais cela a peu d’importance au vu du fait que c’est cette gauche au gouvernement qui prend le mandat d’appliquer, en collaboration avec le petit parti de la droite nationaliste ANEL, un programme d’austérité et des réformes dans l’intérêt du capital grec et européen.

Néanmoins, devant le résultat électoral, ni le regret et le pessimisme, ni l’ optimisme artificiel n’ ont de sens. Le problème pour la gauche révolutionnaire est d’apprécier les nouvelles conditions, pas pour pleurer ou rire, mais pour déterminer les tâches d’ aujourd’hui. Il est certain que l’ instabilité va continuer et rien n’ est pas encore fini.

Le pourcentage important d’abstention exprime surtout la désorientation et le désespoir. Mais en même temps, il montre que l’acceptation du mémorandum comme un mal inévitable est, à un certain degré, une fiction. Les faibles attentes concernant les élections ne sont pas forcément une mauvaise chose.

La montée de l’ Aube Dore en pourcentage (mais pas en voix), malgré l’ absence de l’ autre partie de l’ extrême droite LAOS lors de ces élections, montre que les nazis sont venus pour rester. Il est vrai que pendant la période préélectorale l'A.D. a fait très peu d’apparitions publiques et que l’ hystérie anti-immigrés devant l’ arrivée des réfugiés, que les nazis ont essayé d’utiliser, a été limitée et locale. Mais il est vrai que l' A.D. a une audience politique stable et attend sa chance. Après 4 ans d’ expériences riches du mouvement anti-fasciste, se contenter de souligner que les scores électoraux de A.D. sont inquiétants ne dit rien. Il faut revenir dans les rues pour exterminer les nazis définitivement.

La question centrale que montrent ces élections est que tout un courant social, qui a lutté pendant des années, a renversé des gouvernements et inversé le rapport de forces politiques, se trouve aujourd’hui rangé derrière la direction de Tsipras et de Syriza. Cette orientation le rend passif et conservateur.

Le schéma théorique selon lequel la trahison de SYRIZA mènerait automatiquement à sa dissolution s’ est révélé comme naïf. Les directions ont une influence sur la conscience de la base. La gauche en dehors de SYRIZA a sa part de responsabilité quant à la domination de SYRIZA, et cela en raison de son insuffisance et de ses erreurs, mais la responsabilité centrale de cette situation incombe à l’ opposition qui, jusqu’à récemment, était dans Syriza et à tous les courants qui le soutenaient d’ une façon « critique » ou « tactique », en livrant, en réalité, ce courant social à Tsipras.

Antarsya est une des rares forces du spectre qui a augmenté son influence en chiffres absolus. Son pourcentage est décent, bien qu’inférieur à sa présence au niveau de la lutte des classes et des nécessités. La campagne électorale et la collaboration avec EEK (organisation trotskiste) peuvent être considérées comme positives. Et malgré quelques contradictions, nous avons avancé dans une direction bien plus claire et anticapitaliste qu’en janvier dernier.

Le choix d’Antarsya de ne pas collaborer avec l’Unité populaire était correct, comme on l’a vu avec leur campagne. La relance de discussions, déjà dépassées, concernant de possibles convergences programmatiques et électorales, ne nous apportera rien, sinon des pressions vers une adaptation droitière d’Antarsya.

Au contraire, une unité large du mouvement et sur des axes concrets contre les nouvelles mesures, s’appuyant sur des comités et la coordination de toutes les forces en lutte, avec la gauche anticapitaliste jouant un rôle central, hors du Parlement, dans la rue et sur les lieux de travail, est ce qui peut réellement changer le rapport de forces politique et social.

Malgré le bilan de ces élections, ce rapport des forces peut rapidement changer parce que le système est instable. Il ne faut pas laisser Tsipras se stabiliser à la tête du mouvement : il a pu submerger à cause de la crise. Il ne faut pas permettre à la Nouvelle Démocratie et au PASOK de revenir ni à l'A.D. de profiter.

L’ heure du véritable soulèvement [en grec Antarsya] approche. 

Organisation des communistes internationalistes de Grèce - Spartacus (section grecque de la Quatrième internationale - Secrétariat unifié)

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