« L’éducation notre priorité », « éducation prioritaire sanctuarisée » seront parmi les slogans du PS pour la future campagne présidentielle. La réalité dans les classes est tout autre.
Ainsi, alors que le ministère voulait se payer une opération de com’ autour de la parution du rapport CNESCO sur l’éducation prioritaire (ex-ZEP ou REP), les profs mobilisés lui ont répondu immédiatement dans la rue le 29 septembre dernier par une grève commune sans précédent des lycées ZEP en région parisienne.
Derrière la jungle des sigles, la disparition des moyens !
La mobilisation vient de loin. Déjà, lorsque Peillon lançait ses « assises de l’éducation prioritaire », seules les écoles et les collèges étaient invités à participer, les lycées ZEP étant exclus de fait de la discussion. Et déjà des établissements avaient protesté et s’étaient mis en grève mais de manière isolée.
Sans grande surprise, quand la réforme REP/REP+ a été mise en place par Najat Vallaud-Belkacem qui lui a succédé, aucun lycée n’a été classé REP (Réseau d’éducation prioritaire). Étonnant pour un ministère qui affiche l’objectif de vouloir en finir avec les 150 000 jeunes sortant chaque année sans aucune qualification ou diplôme du système éducatif. S’il veut trouver ces jeunes qui terminent sur le carreau sans aucun diplôme, il peut venir passer dans les lycées de nos quartiers populaires… Une grève importante s’enclenche contre cette réforme et la nouvelle « carte ». Des collèges qui sortent du dispositif partent alors en grève reconductible mais, en repoussant l’annonce d’une carte séparée des lycées, le ministère a réussi à diviser le mouvement entre collèges et lycées.
La stratégie de la ministre est claire : laisser pourrir la situation en espérant pouvoir faire disparaître en catimini l’ensemble des lycées ZEP. Finis les quelques moyens supplémentaires, et une nouvelle économie sur le dos des élèves des quartiers populaires. Pour y arriver, à la suite de Sarkozy, elle applique la bonne vieille méthode qui a permis de casser bien d’autres services publics : la dérégulation de l’éducation prioritaire. Au lieu d’annoncer officiellement la disparition des ZEP en lycée (et de risquer une mobilisation), elle laisse les enseignantEs se débattre dans une jungle de labels incompréhensibles qui se sont empilés année après année : ZEP, zone sensible ou violence, Éclair, politique de la ville, etc. La conclusion est simple, d’une académie à l’autre, d’un département à l’autre, d’un lycée à l’autre, les règles ne sont pas les mêmes et il est d’autant plus difficile pour les enseignantEs concernés de s’y reconnaître, encore plus de se battre ensemble alors que les situations semblent différentes...
Une revendication unifiante, un mouvement qui s’étend
Mais après plusieurs années de grèves et de mouvements dans l’éducation prioritaire, malheureusement pour le ministère, des liens se sont tissés entre les équipes combatives des bahuts mobilisés et des leçons ont été tirés des luttes antérieures.
En l’absence d’un boulot sérieux sur le sujet par les directions syndicales du secteur, plusieurs lycées (au départ dans le 92 et le 95) ont décidé de coordonner leurs actions et de se doter d’une plateforme revendicative commune : l’appel « Touche pas ma ZEP ». Avec une demande unifiante très simple pour tous les établissements qui relèvent de l’éducation prioritaire (quel que soient leur classement) ou qui devraient en relever : une carte élargie de l’éducation prioritaire avec un label unique contraignant en termes de moyens pour les élèves (effectifs limités, cours en demi-groupes…) mais aussi en termes d’indemnités ou de droits à la mutation afin de stabiliser les équipes. Résultat : un mouvement qui s’étend et un collectif qui compte maintenant près de 50 lycées mobilisés signataires et qui se réunit régulièrement à la bourse du travail de Paris pour décider ensemble.
Un mauvais coup pour le ministère : les personnels du secteur ont commencé à prendre leurs affaires en main et ça ne fait que commencer ! Après le succès de la grève du 29 septembre (avec des taux de grève à 80 %, des lycées fermés…), on lâche rien et on continue avec une nouvelle journée de grève mardi 11 octobre pour une nouvelle extension du mouvement.
Correspondant
dans L'Anticapitaliste n° 353 (06/10/16)