Le gouvernement Macron a fait le même choix que ses prédécesseurs pour l’école : une politique d’austérité budgétaire, aux conséquences catastrophiques.
La France se situe au
dernier rang des 34 pays de l’OCDE lorsqu’on compare le nombre
d’enseignants par élève. Si elle se situe dans la moyenne pour le taux
d’encadrement dans le secondaire avec 7,1 enseignants pour 100 élèves,
ce chiffre dégringole dans le primaire avec en moyenne 5 enseignants
pour 100 élèves contre 9 pour 100 dans des pays comme le Portugal ou la
Grèce. Mais le gouvernement n’a pas dans l’idée de créer des postes,
bien au contraire.
Son seul problème, c’est que
cette pénurie d’enseignants finit par se voir. Dans certaines
académies, nous sommes loin de discuter de ce que pourraient être des
conditions d’enseignements plus décentes, mieux adaptées aux besoins des
enfants, ou des conditions de travail plus confortables pour les
professeurs des écoles. À la rentrée, l’administration n’avait même pas
les ressources en personnel pour mettre un enseignant ou une enseignante devant chaque
classe, et elle est dans l’incapacité de remplacer les congés longue
maladie ou les congés maternité. Des classes se retrouvent sans
enseignant pendant plusieurs mois.
CP à 12 : l’arbre qui cache la forêt
La
première réaction du gouvernement contre cette situation a été la mise
en place d’une politique spectacle pour faire croire qu’il agissait pour
l’école. À grands renforts publicitaires, il a mis en place des classes
de CP à 12 dans les écoles en REP+ à la rentrée dernière ; cette mesure
concernera à la rentrée prochaine les classes de CE1 en REP+ et les CP
en REP. Il faut rappeler que cette mesure se fait à moyens constants :
le gouvernement n’a pas créé plus de postes d’enseignants pour ouvrir
ces classes. La conséquence directe de l’ouverture de CP à 12 est donc
la fermeture de dizaines d’autres classes pour récupérer des
enseignants…
Les annonces des projets de carte
scolaire pour la rentrée prochaine ont provoqué de nombreuses
mobilisations. Avec les fermetures annoncées, les effectifs augmentent
dans la majorité des écoles, atteignant des niveaux indécents avec plus
de 30 élèves par classe en maternelle. Même en éducation prioritaire,
les effectifs de CP seront à 12 mais les autres niveaux de classe seront
à 27 ou 28 de moyenne dans des écoles où les classes ne dépassaient pas
25 élèves de moyenne habituellement. Sans compter que Macron n’a
absolument pas anticipé les coulisses de sa politique spectacle. Souvent
les écoles n’ont pas assez de locaux disponibles pour ouvrir ces
nouveaux CP : on propose aux enseignants de mettre deux classes dans
une même salle ou alors de fermer les bibliothèques ou les salles d’arts
plastiques pour réquisitionner des locaux.
La scolarisation obligatoire dès 3 ans, une nouvelle diversion ?
Au
moment même où la colère grondait contre les fermetures de classes, où
les parents d’élèves accrochaient des banderoles ou occupaient les
écoles, Macron annonçait une nouvelle mesure : la scolarisation
obligatoire de tous les enfants dès 3 ans. Comment ne pas considérer
cette mesure comme de la diversion quand on sait que seuls 3% des
enfants de 3 ans ne sont pas scolarisés ? Pire : à y regarder de plus
près, on constate qu’avec cette mesure les communes vont être dans
l’obligation de subventionner l’enseignement privé dès la maternelle.
Comme elles doivent subventionner l’enseignement obligatoire, elles
n’étaient jusqu’alors tenues de subventionner l’enseignement privé qu’à
partir du CP. Si l’enseignement devient obligatoire dès 3 ans, elles
devront aussi financer les écoles privées dès la maternelle. Un beau
cadeau à l’enseignement privé !
Pour riposter, ne laissons pas passer le train
Partout
cette situation de l’école fait réagir : occupation d’écoles par les
parents, grève des enseignants dans le 93, opérations écoles mortes… Le
10 octobre dernier, ainsi que le 22 mars, les enseignants étaient
massivement en grève car le système craque de toutes parts et qu’ils ne
peuvent plus bien faire leur travail dans ces conditions.
Mais
ces réactions restent en ordre dispersées : école par école pour
empêcher une fermeture de classe, département par département contre les
mesures de cartes scolaires… C’est pourtant de la maternelle à
l’université que le gouvernement s’attaque à l’éducation : pénurie
budgétaire, suppressions de postes, réformes du bac, sélection à
l’entrée de l’université : voilà son projet. C’est ensemble et de
manière coordonnée qu’il faudrait riposter. Avec la grève à la SNCF qui
s’engage, il y a la possibilité de renverser le climat social dans le
pays. C’est maintenant qu’il faut engager la riposte dans l’ensemble des
secteurs salariés : cheminots, hospitaliers, enseignants, salariés
du public comme du privé !
Juliette Stein
dans l'hebdo L'Anticapitaliste n° 424 (05/04/18)