Lutte des salariées de la Société Philanthropique, une lutte de classe et féministe !


Les éducatrices de jeunes enfants (EJE) de l’Abri Temporaire des Enfants de la Société Philanthropique en sont à leur 17ème jour de grève. Une grève reconductible dans le secteur social est suffisamment rare pour être remarquée. 

Cette grève, qui fait suite à de multiples tentatives des salariées de se faire entendre, a pour base une revendication simple : l’adéquation des salaires avec les missions et les responsabilités confiées, sur la base du salaire des collègues éducateurs et éducatrices spécialisés (ES) du même service. En effet, pour le même boulot, les EJE de la boîte sont moins payées que leurs collègues ES.

La source de cette inégalité salariale dépasse l’organisme gestionnaire et trouve son origine dans la convention 51 (CCN51) appliquée dans l’établissement. En effet, celle-ci n’a pas réajusté les grille de salaires, alors que la convention collective nationale 66 l’a fait depuis longtemps. Toutes les EJE relevant de la CCN51 sont donc sous-payées, et cela mériterait un mouvement national !

Pourquoi cette lutte est-elle féministe ? 

Parce que les 6 salariées qui se battent sont des femmes 
Elles se sont organisées par leurs propres moyens, combattent leur taulier avec fermeté, prennent la parole en public pour expliquer leur lutte, et se rendent visibles autant qu’elles le peuvent. Dans une société où on invite les femmes a rester discrètes et dociles et à demander sans s’énerver, il leur faut deux fois plus de force pour construire une lutte et la tenir. Les EJE de la Société Philanthropique nous montrent que c’est possible. 

Parce qu’elle met en lumière des inégalités salariales... 
Le secteur social est en soi un secteur assez féminisé : il fait partie de la grande famille des professions du care : des professions peu valorisées, sous-payées, largement occupées par des femmes. Lorsque ces professions du social impliquent des soins physiques à des personnes dépendantes (jeunes enfants, personnes âgées, personnes en situation de handicap), les inégalités sont encore plus flagrantes. Ainsi, si les hommes sont minoritaires mais présents dans certains secteurs/certaines professions (chez les ES notamment), ils se font de plus en plus rare auprès des très jeunes enfants. Ainsi, l’écrasante majorité des EJE sont des femmes, et sont moins bien payées, jusque dans les structures.

...liées au système capitaliste et patriarcal 
Si les professions du care sont majoritairement occupées par des femmes, c’est qu’historiquement, et encore actuellement, les femmes ont été assignées aux tâches domestiques, à la garde des enfants, au don de soi, que ce soit dans la sphère personnelle ou professionnelle. En effet, les compétences attendues dans les métiers du social (sollicitude, patience, capacité d’écoute et de soin) sont présentées comme innées, comme le serait le fameux « instinct maternel ». Mêmes les bourgeoises, qui ne vendaient pas leur force de travail, occupaient leur temps libres avec les œuvres de charité. Aujourd’hui encore, le patriarcat tient debout parce que les femmes effectuent une grande majorité de ce travail de care : que cela se fasse au sein des familles ou bien par l’inégale répartition du travail salarié. Or la prédisposition des femmes à ces métiers n’est pas innée mais construite, tout comme l’instinct maternel n’existes que parce qu’on assigne les filles et les femmes à cette place là. Si pour une femme, s’occuper des enfants, être patiente, maternelle, est une seconde nature, alors pourquoi la payer comme un vrai travail ? Mettre en avant l’inégalité salariale dans ce domaine et réclamer l’égalité, équivaut à une avancée vers l’émancipation de toutes les femmes. 

Pourquoi il est nécessaire de soutenir les salariées de la société philanthropique dans leur lutte :

★ pour qu’elles aient gain de cause et profitent d’une revalorisation de salaire, 
★ pour que leur lutte serve d’exemple sur le plan national et contribue à la révision de l’inégalité dans la CCN51 pour toutes et tous les EJE, 
★ pour que les luttes de femmes soient mises en lumière, valorisées et victorieuses afin de contribuer à une prise de confiance et de légitimité collective des femmes, 
★ parce que nous sommes toutes et tous sous-payés dans le social, et qu’une avancée pour une partie de notre secteur est un espoir d’avancée pour toutes et tous ! 

SOUTENONS LES EJE ! A valeur égale, salaire égal !