Edito du 20/01/15

Oui à l'unité des travailleurs de toutes origines !

Près de deux semaines après les événements, l'onde de choc créée par les assassinats des dessinateurs de Charlie Hebdo et la prise d'otages sanglante du supermarché kasher à Paris ne retombe pas.

Mais après le temps de l'indignation légitime, de la colère et de l'émotion, doit venir le temps des questions : comment en est-on arrivé là ? Quelle réponse donner ? Qu'est-ce qui favorise le terrorisme ? Comment croire à cette « unité nationale » vantée par les politiciens ? Il est urgent et nécessaire de comprendre ce qui se passe aujourd'hui, pour ne pas tomber dans le piège de l'union sacrée.

Quel peuple ?

« Nous sommes un peuple », a affirmé Hollande. Mais qu'avons-nous de commun, nous les exploités, avec le banquier Macron, ministre de l’Économie, qui est en train de détricoter activement le Code du travail et les protections qu'il offrait aux salariés ? Qu'avons-nous de commun avec ces grands patrons qui n'ont de cesse de prendre l'argent public, les milliards du CICE, pour les mettre dans leur poche sans créer aucun emploi ? Qui sont responsables d’un chômage de masse qui engendre la misère et la désespérance ? Qu'avons-nous de commun avec ce Manuel Valls, qui envisage de restreindre nos libertés, de multiplier les contrôles au faciès, aux frontières, en essayant de nous faire croire que le problème du moment est l'afflux d'immigrés ?

Qui sème la barbarie ?

Il est certain que tirer à l'arme lourde sur des dessinateurs, ou sur des juifs, est l'œuvre de monstres. Mais d'où viennent-ils ? Ces groupes « djihadistes » qui terrorisent une partie du Moyen-Orient et de l'Afrique et qui cherchent à agir ici ne sont pas nés de rien. Ils sont le fruit de la politique d'exploitation menée par des compagnies comme Total et des guerres perpétrées par les grandes puissances en Libye et en Irak pour imposer leur domination, et contrôler la production pétrolière. Profitant de l'émotion, le gouvernement s'est d'ailleurs fait plébisciter au Parlement sur ses interventions guerrières dans ces pays. Or, ce sont les guerres impérialistes et leur cortège de massacres, de tortures, de soutien à des régimes dictatoriaux et confessionnels qui nourrissent le racisme d’un côté et préparent le terrain à la réaction intégriste de l’autre. Il n’existe aucun lobby qui contrôle secrètement le monde ; les théories du complot qui se répandent comme une traînée de poudre ces derniers jours ont seulement pour effet de cacher que nous connaissons tous les responsables de cette situation : les capitalistes et leurs représentants politiques.

L'unité avec qui ?

L'opération politicienne de Hollande a réuni beaucoup de dirigeants au nom de la « liberté d'expression ». Comme par exemple le Premier ministre turc, qui vient de bloquer les pages des sites turcs qui publient la Une de Charlie. Ou l'Arabie Saoudite, dont le chef de la diplomatie était présent, et qui a condamné un blogueur qui avait critiqué le poids de la religion à 1000 coups de fouet ! L'unité est certes nécessaire, mais pas avec n'importe qui. Il nous faut retrouver l'unité des exploités : nous sommes tous des travailleurs, quelle que soit notre origine. Cela veut dire qu'il nous faut réagir aux actes islamophobes qui se multiplient (tags injurieux, attaques contre des mosquées, agressions physiques et même un meurtre). Cela veut dire défendre nos camarades immigrés en butte aux imbéciles racistes. Au-delà de cette réaction urgente, la meilleure réponse est de préparer, tous ensemble, les échéances sociales importantes pour le monde du travail, et en particulier la mobilisation du 26 janvier contre la loi Macron.

C'est en luttant au coude à coude contre nos oppresseurs, et non pas en entonnant l'air de l'union sacrée avec nos exploiteurs, que nous pourrons mettre fin aux injustices sociales, qui sont le terreau de toutes les barbaries.