École : non à leur morale rétrograde et stigmatisante !

L’enseignement moral et laïc dans la bouche de l’ancien ministre Peillon, ça n’avait déjà pas franchement le goût de l’émancipation mais plutôt celui du retour à l’ordre, tant prêché par Sarkozy qui en son temps conspuait l’héritage dégradant de Mai 68 sur la jeunesse. Pourtant, depuis septembre 2012, le projet peinait à imprégner les esprits...

Et voilà que, non content d’instrumentaliser jusqu’à l’écœurement l’émotion suscitée par les assassinats des journalistes de Charlie hebdo et la tuerie de l'Hyper Cacher, le gouvernement envoie son Premier ministre et sa ministre de l’Éducation nationale en mission.

Valls s’est donc fendu d’un terme aux lourds relents de colonisation : « le peuplement » des quartiers pour lutter contre la radicalisation... Eh bien oui : ce gouvernement ne veut paraît-il stigmatiser personne, mais en même temps, il insinue sans trop prendre de pincettes que c’est plutôt des quartiers populaires que viendrait la menace, puisque ce serait eux qu’il faudrait « peupler pour éviter la ghettoïsation »...

Morale laïque et valeurs républicaines...

Pour être sûr de bien se faire comprendre, Valls appelle Najat Vallaud-Belkacem à la rescousse. Non contente de déblatérer des analyses peu probantes sur l’éventuel lien entre éducation et actes meurtriers, celle-ci enfonce le clou de l’instrumentalisation.

C’est à l’école de partir en croisade contre les extrémismes religieux en ouvrant ses portes à « des réserves citoyennes », des groupes de volontaires qui interviendraient dans les écoles à partir de la rentrée 2015 à raison d’une heure par semaine afin d’enseigner la morale laïque...
Pire encore, la ministre a annoncé que 1 000 enseignants/es seraient formés à la laïcité pour septembre 2015 et que les candidats professeurs seront évalués sur les valeurs de la République !

Prenant appui sur le refus de quelques dizaines d’élèves de faire la minute de silence ou de la provocation d’autres invoquant des théories complotistes et antisémites, le gouvernement entend déployer tout un arsenal répressif et normatif à l’école.

Formater les élèves ?

250 millions d’euros sur trois ans seraient débloqués, mais pour transmettre quoi déjà ? Parce qu’à dire vrai, les valeurs de la République ne suscitent ni envie ni attrait : impérialisme en Afrique, guerre sociale et projet Macron, flics et armées redéployées, racisme d’État à l’égard des musulmans… Les enseignants/es ne se mettront pas en ordre de bataille pour formater les élèves à ce discours réactionnaire.

Le 3 février, les enseignants/es seront en grève contre l’asphyxie programmée de leur secteur et de leur salaire. Unir les revendications des personnels aux inquiétudes et ras-le-bol d’un certain nombre des élèves sera le seul moyen de relever la tête, afin de ne pas devenir les instruments de la propagande du gouvernement !

Denise Sarraute
dans l'hebdo L'Anticapitaliste n° 274 (29/01/15)