Grèce : un « gouvernement anti-austérité » à l’épreuve des faits
Loin d’être une surprise, la signature par Tsipras du troisième « mémorandum » s’inscrit dans la trajectoire de Syriza qui, au lieu d’organiser et d’en appeler à la mobilisation des classes populaires contre la Troïka, a choisi de gouverner avec le parti de droite ANEL, d’accepter un « compromis » sur le paiement de la dette ou encore de trouver un accord militaire avec Israël. Les luttes sociales ont reculé ces dernières années, et depuis qu’il gouverne, le parti « anti-austérité » na fait qu’alimenter la démobilisation. Syriza prétendait mettre fin à l’austérité tout en respectant les institutions bourgeoises et la propriété capitaliste, et en négociant avec L’Union européenne (UE). Mais les faits prouvent que rompre avec ces politiques antisociales exige un programme anticapitaliste, qui ne peut être imposé que par une lutte massive de notre classe. Un gouvernement « réformiste » refusant cette mobilisation est condamné à trahir rapidement ses engagements, même limités, parce que la crise capitaliste n’offre pas de répit. Si nous souhaitons dissiper les illusions et la confusion, il est impossible de présenter ce type de « gouvernement anti-austérité » comme une perspective pour notre camp.
Aucun raccourci possible
Bien sûr, un programme anticapitaliste serait incompatible avec l’UE et sa politique, mais il le serait surtout avec l’ordre bourgeois, que ses représentants soient à Bruxelles ou à Athènes. La rupture d’avec l’UE serait une conséquence du combat pour imposer un tel programme, et non l’inverse. Ce combat ne pourra être mené que par un puissant mouvement de grèves et de manifestations, par l’auto-organisation de la classe ouvrière imposant son contrôle sur l’économie. Un gouvernement des travailleurs, issu de leurs luttes, s’adresserait par-delà les frontières au monde du travail et à la jeunesse pour opposer l’union des classes populaires d’Europe à cette union des bourgeoisies qu’est l’UE. Tout souverainisme, tout repli national est un danger : il n’y a pas de solution en dehors dune politique de lutte et d’indépendance de classe, forcément internationaliste. Nous n'opposons pas la mauvaise Europe et le bon État national ; le mauvais euro et la bonne drachme : après la capitulation de Tsipras, reprendre son programme en y ajoutant le retour à la drachme et une dévaluation compétitive, ne peut que préparer de nouvelles défaites.
Il est positif qu’une large majorité d’Antarsya ait décidé de participer aux élections avec l’EEK (Parti révolutionnaire des travailleurs) pour défendre le non-paiement de la dette, la nationalisation des banques et l’expropriation des grands groupes capitalistes sous contrôle des travailleurs, la rupture d’avec l’UE. L’existence d’un pôle politique anticapitaliste et révolutionnaire, même faible électoralement, est décisive pour les luttes à venir contre l’austérité et ses conséquences, qui ne pourront se mener qu’en opposition à Syriza. Les révolutionnaires de Grèce, quels que soient leurs choix tactiques (participation à Unité Populaire, à Antarsya, etc.), devraient se coordonner, maintenir des liens, dans l’objectif dune politique indépendante des réformistes. Mais le programme d’Unité Populaire insiste sur le développement d'un capitalisme national et ses dirigeants veulent recommencer la Syriza d’avant 2013... celle qui a mené à la Syriza d’aujourd’hui.
Une conférence européenne de soutien à un prétendu « plan B », basé sur la sortie de l’euro en lieu et place de la remise en cause du capitalisme, ne représenterait pas une avancée. Une coordination au niveau européen devrait viser la convergence des luttes contre les politiques antisociales des gouvernements, du patronat et de leur UE, autour déchéances concrètes de mobilisation. Dans un tel cadre, nous pourrions défendre notre programme anticapitaliste révolutionnaire, sans en faire un préalable à l’action commune. C’est notre seul plan : tout le reste est une voie sans issue pour notre classe.
L’équipe d’animation du courant Anticapitalisme & Révolution