Exactement deux ans après la dernière réforme ferroviaire, un nouveau bras de fer va bientôt opposer les cheminots au gouvernement et au patronat. En effet, cette réforme antisociale a non seulement divisé la SNCF en trois entreprises différentes, mais elle a aussi abrogé le décret relatif à la réglementation du travail des cheminots (le « RH 0077 »). Ce décret continue tout de même à s’appliquer... le temps de le remplacer par une convention collective de toute la branche ferroviaire.
Syndicats et patronat du secteur ferroviaire ont donc jusqu’au 31 juin 2016 pour négocier cette convention collective, le gouvernement menaçant de légiférer unilatéralement en cas d’échec des négociations...
L’enjeu de ces négociations est énorme, tant pour les cheminots que pour l’UTP (branche ferroviaire du MEDEF, regroupant des filiales de Bouygues, Veolia, Deutsche Bahn, ou du groupe SNCF lui-même...) : soit les conditions de travail des 5 000 cheminots du privé sont harmonisées (vers le haut) en étant alignées sur celles des 150 000 cheminots SNCF, soit c’est le contraire... Concrètement, on parle de plus de flexibilité, de trois jours de congés et 18 de repos en moins par an, d’amplitudes horaires pouvant aller jusqu’à 14 heures par journée de travail... Il y a deux possibilités : soit un progrès significatif des conditions de travail des cheminots du privé, ce qui priverait le patronat ferroviaire des surprofits obtenus grâce au dumping social ; soit le pire recul social pour les cheminots depuis des décennies, et des montagnes de bénéfices pour Pépy et sa clique !
Préparer la mobilisation
La conclusion est simple et commence à se discuter largement parmi les cheminots : il n’y a pas de négociation possible entre intérêts antagonistes, et il faut donc préparer l’affrontement avant le 31 juin ! Il s’agit de préparer une grève reconductible qui aille jusqu’au bout : plus massive qu’en 2014, et surtout plus active (participation aux AG, actions et manifestations). Et pour ne pas se laisser enfermer dans une lutte catégorielle, il y aura un enjeu énorme à lier cette grève aux mobilisations qui émergeront contre le rapport Badinter et la casse du Code du travail : c’est le chemin vers une dynamique interprofessionnelle !
Au niveau syndical, la donne est moins claire qu’en 2014. Il y a deux ans, la grève n’avait été soutenue que par la CGT et SUD-Rail, pendant que l’UNSA et la CFDT remplaçaient les grévistes... Cette fois-ci, même les syndicats jaunes ont du mal à assumer le projet face aux cheminots ! Quoi qu’il en soit, si l’unité syndicale sera utile pour donner confiance aux cheminots et lancer la grève, elle pourrait aussi se transformer rapidement en obstacle pour une grève qui voudrait aller jusqu’au bout... C’est pourquoi la solution ne sera pas à chercher du côté des appareils syndicaux – même unis – mais bien dans l’auto-organisation, dans les Assemblées Générales et dans leur possible coordination !
Gabriel Lafleur