Cette semaine pourrait bien être la semaine de tous les dangers pour le gouvernement Valls-Hollande : après les raffineurs, voilà le tour des cheminots, des agents de la RATP, des salariés du secteur aérien de rentrer dans la grève qui dure, celle qui bloque, celle qui fait mal au portefeuille des actionnaires et des patrons...
D’une manière générale, tout le monde sent bien que c’est vraiment le moment d’y aller une bonne fois pour toutes pour faire reculer ce gouvernement, avec les multiples initiatives de blocages de zones industrielles, de plateformes logistiques, de dépôts de carburant ! C’est aussi pour cette raison que des grèves éclatent dans plusieurs entreprises contre la dégradation des conditions de travail (chez PSA), pour l’augmentation des salaires (chez Amazon), contre les licenciements (chez Vallourec), contre la précarité (à La Poste)...
Le monde du travail debout !
La colère contre la loi travail révèle l’ensemble de la colère sociale qui couve depuis des années, la mobilisation entamée depuis presque trois mois maintenant redonne de l’air à toutes celles et ceux qui ne veulent plus subir et sont prêts à relever la tête.
Le mouvement est entré dans une nouvelle étape avec la grève des salariés de secteurs clés de l’économie et les différents appels de la CGT à amplifier et « radicaliser » la mobilisation. La classe ouvrière occupe le terrain politique. Et le gouvernement a beau envoyer les CRS lever brutalement les blocages, non seulement il provoque de nouvelles actions en réactions mais ce n’est pas cela qui remettra en route les raffineries ni fera rouler les trains ou voler les avions...
Et les propos d’un Macron, en réponse à deux grévistes qui l’interpellent lors d’une visite à Lunel (« Vous n’allez pas me faire peur avec votre tee-shirt. La meilleure façon de se payer un costard, c’est de travailler » !) transpirent la morgue et la peur mélangées des fins de règne, connues par d’autres privilégiés en d’autres époques, quand on répondait au peuple qui n’avait plus de pain de manger de la brioche !
N’avoir confiance que dans nos propres forces
La suite dépend de la bataille sociale et politique en train de se jouer, de l’écho que rencontrera le durcissement de la lutte dans ces secteurs, du sentiment de légitimité et de la confiance face à la campagne politique anti-grève, anti-« casseurs » et plus particulièrement anti-CGT orchestrée par l’ensemble du personnel politique, de Valls à Sarkozy et Le Pen… Elle dépendra aussi de la capacité de l’ensemble des travailleurs et des travailleuses mobilisés à développer toutes les formes d’auto-organisation dans le mouvement (assemblées générales, comités de grèves, coordinations) afin que s’exerce par les travailleurs eux-mêmes le contrôle de leur lutte.
Cela sera déterminant pour empêcher tous les dirigeants syndicaux, et en premier lieu Philippe Martinez, dont le numéro de téléphone semble bien connu de Manuel Valls, de s’asseoir autour d’une table avec le gouvernement pour discuter... Car il n’y a rien à discuter, ni à négocier sans que le gouvernement n’ait auparavant annoncé le retrait pur et simple, le retrait « total » comme on le crie dans les manifs, de ce projet de loi néfaste pour l’ensemble du salariat. On reste fermes et déterminés : ce projet n’est ni amendable ni négociable !
Le mouvement a isolé le gouvernement, qui est minoritaire, dans le pays comme à l’Assemblée. L’obliger à retirer sa loi est aujourd’hui possible, et de plus en plus nombreux sont celles et ceux qui le comprennent. Le mois de juin s’annonce chaud…
On amplifie les grèves, on va jusqu’au bout !
L’heure est aujourd’hui à l’extension de la grève. Il faut aider à surmonter les doutes, convaincre, faire de chacun et chacune des militants du mouvement. Il faut préparer la journée de grève du 14 juin et la manifestation nationale à Paris, mais d’ici là, il faut surtout développer, renforcer les grèves dans les entreprises, ainsi que dans la fonction publique qui sera la prochaine cible si la loi El Khomri est adoptée. On n’a jamais été aussi près de la victoire.
Pour celles et ceux qui se battent contre la loi travail, il est sans doute temps aussi de mettre en avant d’autres revendications, celles qui peuvent contribuer à généraliser le mouvement à l’ensemble des salariés : interdiction des licenciements, partage du temps de travail entre toutes et tous, augmentation uniforme de tous les salaires de 500 euros !
Pour celles et ceux qui n’en peuvent plus de cette société-là, fondée sur les profits et l’exploitation, ni de ceux qui la défendent, il est aussi temps de mettre en avant une autre façon de gouverner et de faire fonctionner la société, celle qui permettra enfin de faire respecter les libertés démocratiques et de mettre en place un gouvernement entièrement dévoué à la satisfaction des besoins du plus grand nombre, un gouvernement des travailleurs au service des travailleurs !
Valls, Hollande, Gattaz peuvent partir, nous pouvons faire fonctionner la société sans eux. Ils ont les millions mais nous sommes le nombre.
Marie-Hélène Duverger
dans l'hebdo L'Anticapitaliste n° 339 (02/06/16)