Grève des ouvriers de la banane en Guadeloupe : les forçats se font entendre


C’est la première fois depuis 30 ans qu’une telle quantité de plantations de banane sont en grève dans l’île, 17 au total, encouragées par la victoire de l’une d’entre elles...

Les ouvriers de la plantation Bois Debout ont en effet réussi à obtenir en justice des rappels de salaire compris entre 10 000 et 20 000 euros par travailleur... et à obliger les patrons à payer !

Lorsqu’on lit leurs revendications, on comprend aisément les raisons de la colère : ils demandent la mensualisation de leurs salaires, une obligation légale pourtant depuis 1989, et le rappel de toutes sortes de prélèvement sur salaires indûment retirés. Ils veulent également une amélioration de leurs conditions de travail, qui ressemblent vraiment à du travail forcé : certains ouvriers transportent entre 6 et 7 tonnes de bananes par jour sur leurs épaules, d’autres parcourent 24 km à pied dans une journée, ceux qui découpent les régimes soulèvent l’équivalent de 24 à 28 tonnes quotidiennes. Douleurs, déformations physiques, rhumatismes en résultent. Sans parler de l’exposition aux pesticides entraînant maladies et décès prématurés. Et tout cela pour des salaires variant de 1 000 à 1 100 euros net mensuels.

C’est pour cela que les travailleurs demandent une convention collective pour tous. « Les travailleurs de la banane sont traités comme des esclaves, mais ils vont se libérer eux-mêmes », affirment-ils.

Les békés se croient tout permis...

La grève a démarré le 18 mai, et est devenue illimitée, reconductible chaque jour, avec une proportion de 60 % environ de grévistes. Un comité de grève a été élu pour diriger la grève, avec quatre travailleurs par plantation, soutenus par la CGT Guadeloupe. Des contacts sont pris avec leurs camarades de Martinique.

Les planteurs, ces riches békés qui se sont enrichis sur l’esclavage, ont largement les moyens de payer ce que demandent les ouvriers, eux qui reçoivent d’énormes subventions de l’Union européenne, et, depuis cette année, des fonds de la Région. Cette année, ils ont ainsi perçu près d’un million d’euros sur nos impôts. Et ils se croient tout permis : le 19 mai, un planteur de sinistre réputation, Tino Dambas, « un patron noir qui sert de marionnette aux gros békés », a dénoncé les ouvriers et ­a tenté de foncer avec un tracteur sur les grévistes qui s’étaient réunis à un rond-point. Il a été dénoncé par tract sur toute l’île.

Les forces de l’ordre ont été envoyées contre les grévistes qui empêchaient les camions conteneurs de passer. Les ouvriers ont l’habitude de conflits longs et durs dans cette île marquée par la domination musclée des békés, héritiers des esclavagistes, et proches des allées du pouvoir en métropole. Mais la détermination des ouvriers n’en est que plus grande !

Régine Vinon