Un
mois après l’incendie qui a ravagé une partie de l’usine classée Seveso
et des entrepôts de Normandie Logistique, entreprise mitoyenne qui
stockait des produits toxiques appartenant à Lubrizol, les informations
qui continuent à sortir avivent colère et inquiétude au sein de la
population.
Les pompiers du SDIS-76 ont ainsi reçu
leurs analyses biologiques réalisées après l’intervention. Et pour une
dizaine d’entre eux, les bilans sanguins font apparaître des résultats
anormaux pour le foie, avec des niveaux de transaminases trois fois
supérieurs à la normale, ainsi que des perturbations au niveau de la
fonction rénale. Et des pompiers témoignent à propos de l’inadaptation
de leurs équipements de protection.
Oui, Lubrizol ça pue, ça blesse et ça pollue...
C’est
aussi le sort révoltant réservé aux gens du voyage résidant sur l’aire
du Petit-Quevilly, à quelques encablures de l’usine, qui a ému celles et
ceux qui ont assisté à la réunion publique organisée par le collectif
unitaire jeudi 17 octobre à Rouen. Alertés par l’incendie, les fumées,
et sans information, ces riverains de l’aire d’accueil ont sollicité
l’intervention des pompiers puis des autorités, l’air étant
irrespirable, pour savoir s’ils devaient évacuer le campement. Réponse
hallucinante des autorités : les caravanes n’étant pas considérées comme
des habitations, les mesures de sécurité ne peuvent leur être
appliquées ! Dans un coin de leur terrain, au milieu des feuilles mortes
et de la boue, de l’amiante a été entassée. Ces familles ont dû subir
les odeurs pestilentielles aggravées par la précarité de leur habitat :
les enfants ont été atteints de vomissements, diarrhées, irritation des
muqueuses, troubles respiratoires. Elles ont demandé leur transfert sur
une autre aire. La réponse a été de les disperser sur plusieurs lieux
alors qu’elles ne le veulent pas car elles vivent ensemble depuis
toujours. Et par ailleurs leur dispersion annihilerait leurs
possibilités de recours juridiques et de réparations. Comble du
cynisme : elles ont reçu un avis d’expulsion de la part de la
métropole !
… et plus que jamais il faut la vérité et la justice !
C’est
l’un des intervenants à la tribune du meeting du 17 octobre qui a
proposé, devant les 800 personnes présentes, que la mobilisation
collective réponde présente pour empêcher cette expulsion. Il a été
énormément applaudi. Des dizaines d’autres interventions ont nourri le
débat amorcé par les interventions de la tribune où se sont succédé
plusieurs militants et militantes syndicalistes et d’associations environnementales,
apportant chacun des informations techniques solides mais aussi la
dénonciation des responsabilités patronales et étatiques.
L’affluence
massive à cette réunion publique est révélatrice d’une profonde
aspiration populaire à obtenir la transparence complète et la mise en
place d’une expertise indépendante, pour que des mesures immédiates
soient prises afin d’empêcher les industriels de mettre nos vies en
danger. En effet, les communes touchées par le nuage comme la zone
autour de l’usine ne sont toujours pas dépolluées. Amiante, suies
cancérogènes et dioxine sont encore présentes. Alors que le gouvernement
communique régulièrement sur les risques accrus de maladies lorsqu’on
cumule nourriture grasse, alcool et tabac, il minimise volontairement le
risque d’effet cocktail lié à l’incendie.
La
prochaine échéance de mobilisation à l’appel du collectif unitaire se
déroulera samedi 26 octobre, entre 15 h et 17 h sur le parvis du Palais
de justice de Rouen avec diffusion de tracts, prises de parole, échanges
avec la population afin de continuer à construire le rapport de
forces.
Marie-Hélène Duverger
Hebdo L’Anticapitaliste - n° 494 (24/10/2019)