Dimanche 16 juin, à 6 heures du matin, un syndicaliste de La Poste des Hauts-de-Seine, Gaël Quirante, a été réveillé par la police chez lui. Il a été emmené au commissariat et placé en garde à vue pour plus de 24 heures. Deux autres personnes ont été interpellées dans les mêmes conditions.
Gaël est délégué syndical dans ce département où une grève dure depuis près de 15 mois pour empêcher des réorganisations, synonymes de suppressions de postes et d'augmentation de la charge de travail.
Une arrestation pour casser la lutte
Après des semaines de négociations, et alors que les 150 grévistes ont depuis plus d'un an des paies à zéro euro, un protocole de fin de conflit était sur le point d'être signé. Mais la direction de l'entreprise refuse toujours de garantir qu'aucune sanction ne sera prononcée pour les militants et militantes de la grève et elle refuse de reporter significativement les prochaines réorganisations sur les bureaux les plus touchés par la grève. Elle a même menacé de retirer les avancées précédemment obtenues par des grévistes.
Accepter ces dernières conditions ne coûterait rien à cette entreprise, dont le chiffre d'affaires est de plus de 24 millions d'euros ! Elle préfère au contraire dépenser de l'argent pour faire durer le conflit, en embauchant des intérimaires et en payant cher des vigiles et des huissiers. Cette politique ne fait pas de mystère : il s'agit de dissuader ceux et celles qui osent se battre pour leurs droits.
C'est dans le même sens que Gaël a été arrêté : vendredi 14 juin, avec une centaine de grévistes et de leurs soutiens, il a participé à une occupation du siège national de La Poste. Au lieu d'envoyer un interlocuteur pour rouvrir les négociations, la direction a préféré appeler la police pour déloger les militants et militantes.
Résultat, Gaël a donc été arrêté pour « dégradation » du matériel postal... Alors même que sur des vidéos visibles sur les réseaux sociaux, on voit bien que c'est la police qui a cassé une porte à coups de bélier et de masse. L'occupation était pacifique et sans dégradation.
Et qui dégrade le service public postal, sinon l'entreprise qui ferme 500 bureaux par an et a supprimé 100 000 emplois en dix ans ? Qui devrait se faire arrêter, sinon les dirigeants d'une boîte dont les méthodes managériales poussent parfois les travailleurs et les travailleuses au pire ?
Finalement, après plus de 24 heures de garde à vue, les accusations ont changé : Gaël s'est vu reprocher une « violation de domicile », alors que la justice reconnaît pourtant que l'occupation d'un siège est un mode d'action normal dans un conflit social. Il est finalement ressorti sans poursuite connue à cette heure, preuve que cette garde à vue était totalement injustifiée.
Tout cela ne tient pas la route : il est évident qu'il s'agit d'un prétexte pour mettre des bâtons dans les roues de la grève. C'est pour cela qu'ont aussi été arrêtés une militante du comité de soutien aux grévistes et un journaliste indépendant, qui avait filmé pendant l'occupation du siège. Manifestement, non seulement il ne fait pas bon contester le patronat, mais il ne faudrait même pas soutenir ou montrer ceux et celles qui le font !
Une opération contre-productive
Ces arrestations ont provoqué une immense indignation parmi les travailleurs et les travailleuses de La Poste et bien au-delà. Des rassemblements ont eu lieu devant les commissariats jusqu'à la fin des garde à vue et c'est sous les acclamations de leurs camarades que les réprimés sont sortis.
À la SNCF, dans la santé, dans l'Éducation, dans les manifestations des gilets jaunes... ce sont des milliers de personnes qui font face à la répression du patronat et du gouvernement. Il serait grand temps que toutes et tous s'unissent pour riposter ensemble, tout comme il est urgent que l'ensemble du monde du travail se mobilise pour mettre fin aux attaques et défendre enfin les droits de la grande majorité de la population.
Si les dirigeants répriment, c'est qu'ils ont peur. À nous de leur en donner d'autres raisons. Si nous sommes des millions mobilisés, ils ne pourront rien contre nous !
Éditorial du 18/06/19