A deux mois des attentats du 11 janvier et de l'ouverture d'une séquence dont le gouvernement avait su habilement profiter pour se renforcer et recomposer partiellement un régime politique fatigué, de premières brèches sont apparus dans le climat suscité par l'offensive autour de l'union nationale. Sur le terrain social d'abord, avec des luttes notamment sur les salaires qui font preuve d'une combativité supérieure aux mobilisations habituelles autour des NAO. L'approche des élections départementales et la nouvelle dégringolade de Hollande et Valls dans les sondages, marquent aussi l'essoufflement de la dynamique créée autour du 11 janvier. Devant l'approche d'une large victoire du FN et d'une véritable claque pour le PS, mais surtout d'une exclusion massive du second tour pour les listes socialistes, le gouvernement cherche à opérer une polarisation binaire avec le FN qui sert aussi bien à prendre des voix à une UMP en crise (le PS étant présenté comme seul à même de battre le FN au 2e tour) qu'à mettre la gauche de la gauche sous pression unitaire et les oppositions internes au PS en sourdine. Pour sa part, le NPA présente un nombre restreint de listes pour ces élections qui sont celles parmi les plus boudées par les classes populaires, et réitère sa volonté exprimée lors de son congrès d'exprimer une voix indépendante en de telles occasions, celle des travailleur-se-s et des classes populaires. Notre parti sera sans doute amené à s'exprimer pour préciser, sauf là où il se présente bien sûr, qu'il ne soutient aucun candidat mais aussi pour dire que chaque voix pour le Front national est une voix contre le camp des travailleurs et des jeunes. Nous n'aurons aucun scrupule pour dénoncer en même temps la politique du gouvernement Valls-Hollande qui fait le lit du FN.
L'usage du 49-3 par le gouvernement pour faire passer en force la loi Macron montre qu'à force de mener une politique de casse systématique des acquis sociaux, l’appui de sa propre majorité parlementaire n’est même plus garanti. Cela sanctionne la fin de toute forme de crédibilité auprès de l'ensemble de la population (sans même parler de popularité !) du gouvernement Hollande, qui n'est plus que le bras armé du patronat. L'expression « gouvernement PS-MEDEF » est plus que jamais d'actualité. Néanmoins, cet épisode met aussi à nu l'incapacité totale des « frondeurs » à incarner une alternative à ce gouvernement, de même que Mélenchon, qui a appelé les parlementaires du Front de gauche à ne pas voter la motion de censure.
Ce passage en force de la loi Macron poursuit sur un terrain plus institutionnel la méthode forte et répressive employé par le gouvernement à défaut de légitimité. La violence spectaculaire employée pour déloger les zadistes de Sivens, en faisant reposer une part de la répression sur des milices composées d'agriculteurs de la FNSEA et proches de l'extrême droite, poursuit la dynamique de militarisation de l'espace publique amorcée à l'été (Palestine) puis à l'automne (Rémi Fraisse), qui accompagne une accélération des attaques contre les syndicalistes et les militant-e-s.
L'esprit du 11 janvier a servi enfin à François Hollande à avancer dans un certain nombre de projets comme l'approfondissement de l'alliance avec l’État d'Israël ou le régime de Al Sissi en Égypte, éléments essentiels, avec l'engagement dans la guerre contre Daesh, du redéploiement de l'impérialisme français au Moyen Orient. Les bruits de bottes reprennent aussi au sujet de la Libye voire du Mali après les attentats à Bamako et contre une base de l'ONU, toujours au prétexte de lutte contre le djihadisme.
Sur le continent européen, la capitulation du gouvernement grec est une victoire pour l’exécutif et le patronat hexagonal, mais la crise majeure qui reste ouverte en Ukraine constitue un grand facteur d'instabilité et y compris de tensions entre l'Allemagne et les États-Unis.
I- Les luttes franchissent un cran, sans pour l’instant
s’imposer au centre de la situation politique nationale
La multiplication des luttes sur la question des salaires est révélatrice d'un petit changement du climat social
Depuis plusieurs années, avec la « crise » et la résolution des patrons et des gouvernements à baisser le coût du travail, les actions qui ont lieu traditionnellement autour des NAO (Négociations Annuelles Obligatoires) sur les salaires n'ont le plus souvent qu'un caractère symbolique. Or, depuis décembre 2014, on assiste à une multiplication de ces conflits mais surtout à un changement de ton. Il faut dire que selon 60 millions de consommateurs, le pouvoir d'achat aurait baissé, en moyenne, de 1500 euros annuels depuis 2009.
Aux conflits symboliques s'en ajoutent d'autres de plus grande durée avec une détermination plus importante et la volonté d'obtenir réellement quelque chose. Ces conflits touchent de très nombreuses professions : des vendeuses des boutiques de la tour Eiffel aux salariés des chantiers navals en passant par les maîtres-nageurs, les convoyeurs de fonds de la Brink's, les employés de la MGEN, de la Société générale, d'Amazon, de Jet Aviation, des supermarchés, du bâtiment, de fromageries, de cantines scolaires, etc. Mais surtout, il y en a de plus longs, plus déterminés pour des revendications souvent plus importantes ; chez Leroy Somer par exemple, à Angoulême, le conflit a duré quasiment un mois de la mi-décembre à la mi-janvier pour un treizième mois et une augmentation de 100 euros. Les routiers de leur côté sont entrés en lutte, en décembre et janvier, pour 100 euros également, allant pour certains jusqu'à 10 jours de grève. L'intersyndicale du transport routier, cette fois élargie à la CFDT appelle de nouveau les routiers à la mobilisation à partir du 15 mars. C'est une évidence qu'un conflit qui s'installerait dans la durée chez les routiers, avec des actions de blocage serait une très mauvaise nouvelle pour le gouvernement et le patronat. Les salariées précaires de l'Université Paris 8 en grève depuis le 19 janvier montrent une détermination sans précédent dans leur grève pour les « 98 euros » et l'amélioration de leurs conditions de travail.
D'autres grèves récentes ont montré que les travailleurs sont déterminés à obtenir satisfaction en répétant les débrayages sur plusieurs semaines: chez Vinci, Thalès, Michelin, Paulstra, Sanofi, Carrefour, Bigard, Dassault, Lindt, L'Oréal, Legrand, Intermarché, ou encore dans les transports en commun de plusieurs villes.
Et, chose nouvelle, alors que jusqu'en janvier, les patrons ne cédaient rien, il semble que depuis février, ces derniers commencent à lâcher prise. Oh certes pas sur tout. Mais au moins l'inflation : 1,5% par exemple chez Eramet ou Thalès, 2% chez Vinci, 60 euros mensuels chez Alpina ou Tecumseh.. C'est un élément nouveau depuis le blocage des salaires initié assez largement depuis 3 à 5 ans. Et surtout c'est important alors que le blocage des salaires est au centre du dispositif d'austérité du gouvernement et du patronat.
Les premières concessions du patronat résonnent comme s'il commençait à prendre la mesure du mécontentement et supputait que ce mouvement qui dépasse largement le caractère symbolique traditionnel des NAO pouvait aussi très bien s'étendre à tous les domaines, cristalliser toutes les colères. D'autant que certains de ces mouvements ont commencé comme débrayages symboliques à l'appel des syndicats mais, du fait d'une participation importante et sous la poussée des salariés, se sont transformés en grève et pour des revendications sérieuses. Enfin, alors que les débrayages ou grèves avaient commencé plutôt dans des entreprises qui « marchent » bien, on constate maintenant ces conflits sur les salaires dans des entreprises où il y a des menaces sur l'emploi.
Un mécontentement plus généralisé exprimé par celles et ceux qui se bagarrent
Une bonne partie de ces conflits sur les salaires s'accompagne de revendications sur les conditions de travail, les horaires, la flexibilité, l'emploi... Cela montre le potentiel de convergence et de développement des mobilisations qui existe aujourd'hui de manière latente dans la situation, Cela pourrait commencer à redonner à des millions de travailleur-se-s la confiance nécessaire à l'expression de leurs aspirations.
Ainsi on ne peut pas s'empêcher de rapprocher ces conflits sur les salaires de ceux des postiers au même moment sur les horaires et les conditions de travail, voire même celui de Métaltemple à Fumel, où les salariés menacent de faire sauter une machine importante de l'usine contre un « plan social ».
A la Poste, où les grèves sont depuis plusieurs années chroniques pour refuser les réorganisations, celles-ci sont trop souvent confrontées à la dispersion, à l'émiettement et sont du coup il faut des grèves très longues et particulièrement offensives pour que celles-ci arrachent une victoire. Ce qui est nouveau avec la grève des facteurs de Basse-Normandie c'est que pour la première fois depuis longtemps, c'est l'ensemble d'une région (avec de plus une unité syndicale quasi-historique) qui a fait grève ensemble sur les mêmes revendications, à savoir le refus de la pause méridienne non-payée imposée. Et du coup, la direction de la Poste a reculé dans une majorité de bureaux en quelques jours sur la principale revendication. On ose imaginer les résultats qu'aurait pu avoir cette grève si les négociations n'avaient pas eu lieu bureau par bureau comme dans la plupart des secteurs géographiques. Ce sont les limites posées à la grève l'absence de structures d'auto-organisation appelant à la coordination des postiers à l'échelle régionale alors même que le premier jour tous les postiers de la région avait manifesté ensemble devant le siège régional à Caen. Mais cela permet d'en discuter à une large échelle parmi les salariés de la Poste car la victoire obtenue redonne évidemment confiance.
Dans la santé, depuis plusieurs mois, les mouvements de colère, de mobilisation et de grève dans les hôpitaux, dont l'émergence du mouvement « Convergence contre l'Hôstérité » a été un des signaux marquants, ne retombent pas. De plus en plus de travailleurs de la santé, confrontés aux pires budgets d'austérité jamais avalisés par un gouvernement, se battent contre la dégradation du système de soins publics et de leurs conditions de travail. Les mouvements de grève à l'hôpital du Mans et de Cahors en sont les plus récentes expressions.
Comprendre l'importance de ces mouvements sans exagérer leur portée
Ces mouvements restent pour l'instant le fait d'une minorité de salariés et aucun d'entre eux n'acquièrent une dimension nationale, à même de bouleverser la tendance au sentiment d'impuissance et de découragement ressentie par la majorité de notre camp social. Mais pour les militants anticapitalistes que nous sommes, il est important d'en saisir la portée à la fois dans ce que ces mouvements peuvent révéler de plus profond dans les modifications de l'état d'esprit des salariés et comme possibilités d'intervention pour notre parti et ses militants. Il est possible qu'on s'achemine vers une nouvelle phase du type de celle qui avait été marquée par la première vague de luttes contre les licenciements en 2008-2009 ; à la différence, qu'en 2009-2010, c'était le début de la crise dont on ne mesurait sûrement pas toute la dimension alors qu'aujourd'hui cela fait des années que les salariés ont pu en voir les conséquences catastrophiques et combien cela a pesé sur la volonté de lutte.
Les grèves sur les salaires sont des grèves plus offensives que sur l'emploi ou les conditions de travail, qui elles, sont plus défensives. Pour ces dernières, on veut éviter une détérioration, un recul, on réagit « contre ». Avec les luttes sur les salaires, les travailleurs agissent « pour », ils veulent plus. C'est-à-dire qu'ils ne croient plus - ou moins - à tout ce qu'on leur a dit sur la crise, les efforts nécessaires... Et l'argent que gagnent les patrons, les PDG, les banques... est plus visible, plus scandaleux... le capitalisme est moins justifié... les luttes peuvent être plus contagieuses.
Ce qui signifie, d'une part de bien savoir si ce mouvement se confirme, d'y être tous attentifs, d'autre part, de changer nous-mêmes de registre, d'habitudes et de passer de prises de positions de principe, au caractère un peu général, à un combat politique au quotidien pour s'adresser - voir entraîner -des milliers d'hommes et de femmes en mouvement, bref chercher à représenter et diriger ce mouvement.
Les mobilisations en cours rappellent aussi la vague de lutte contre les fermetures de site début 2013, ou les mobilisations des intermittents, des cheminots puis des hospitaliers en juin 2014, et des pilotes en septembre.
Nous pouvons leur être utile pour le moment en leur donnant clairement conscience de leur multiplication parce qu'elles sont encore diffuses, dispersées, en faisant savoir dans nos tracts, nos interventions, nos déclarations publiques ou dans les syndicats que cette colère générale est là. Il ne peut plus être question et moins que jamais pour notre organisation de parler « d'atonie sociale » ! Nous devons aussi être en mesure d'avancer un programme à même d'unifier les luttes. Celui de la hausse des salaires – par la revalorisation du point d'indice en ce qui concerne la fonction publique - et de leur indexation sur l'inflation est peut-être aujourd'hui le principal. Contre le chômage, qui a franchi en février la barre des 10%, il est essentiel de revendiquer le partage du travail entre toutes et tous, sans baisse de salaire. Les fermetures d'entreprises et de sites qui se maintiennent appellent une réponse autour de l'expropriation et de la remise en production sous contrôle des travailleur-se-s de toute entreprise qui ferme ou licencie. Un dernier axe essentiel se situe autour de la lutte contre la précarité, avec l'embauche de tous les précaires, la défense du CDI et du statut de fonctionnaire. Enfin, face à la loi Macron, nous devons en exiger son retrait.
Une augmentation et des petits changements des mobilisations dans la jeunesse
Ce contexte global de « réchauffement social » touche aussi la jeunesse. Ces dernières années la jeunesse s'est surtout mobilisée sur des questions plus directement politique (Léonarda et Katchik, Rémi Fraisse, FN, …). La lutte sur l'université du Mirail en décembre dernier a vu cet aspect « politique » se combiner à des questions plus concrètes. En effet, près de 2000 étudiants se sont mobilisés et plusieurs centaines ont été en grève active contre la répression et l'austérité budgétaire. Dans ce sillage, depuis quelques mois on assiste à plus de luttes locales sur les universités, sur les questions matérielles. Dans les IRTS (travail social), plusieurs manifestations ont regroupé quelques milliers d'étudiants pour la gratification de leur stage, et le mouvement a eu un caractère national. Dans les ESPE (école de formation des profs) depuis la réforme de la formation de 2009 les conditions d'études sont tellement insupportables que les luttes contre la surcharge de travail sont monnaies courantes. C'est actuellement l'ESPE de Grenoble qui a connu une semaine de blocage total, à l'image de celui du Mans l'année dernière ou d'autres ailleurs. Ces mobilisations s'étendent aussi d'un point de vue géographique. Alors que ces dernières années les poches de contestations étudiantes étaient très provinciales (Angers, Montpellier, Rennes, Clermont-Ferrand et Toulouse) la mobilisation de plus de 500 étudiants en AG sur l'université d'Orsay, combiné à la situation de grève des personnels sur Paris 8 et à des AG à une centaine sur Villetaneuse montrent que le petit climat d’ébullition touche la région parisienne. Cela a une importance notamment parce que des journées de mobilisation comme le 5 mars, date « nationale » du supérieur, prennent une autre allure.
II- Ce que peut nous permettre le 9 avril
Les directions syndicales poussées à agir bien malgré elles
L’esprit du 11 janvier (avec le choix de manifester derrière des ennemis de classe) avait anesthésié encore un peu plus les directions syndicales concernant Macron et la politique anti-ouvrière du gouvernement. La trêve sociale semblait plus que jamais bien instaurée ! Mais le scandale du 49.3 s'est combiné à la poussée du mouvement de grève actuel sur les salaires C'est pour cela qu'après des mois d'inaction des centrales syndicales CGT, FO, Solidaires (sans parler de la collaboration sans nuances de la CFDT, UNSA et CGC) la journée de grève et de manifestation interprofessionnelle du 9 avril est annoncée près d'un mois et demi à l'avance par ces organisations syndicales (que la FSU a décidé du bout des lèvres de rejoindre, ne pouvant décemment pas rester à l'écart sous peine de faire partir en courant vers d'autres horizons syndicaux une partie de ses propres militants les plus combatifs). Il y a désormais pour les directions syndicales, et notamment celle de la CGT et son tout nouveau secrétaire confédéral, une certaine obligation à réussir pour ne pas être totalement discréditées pour une longue période. Les protestations dans la CGT contre l'affaire Lepaon se sont apparemment tues, mais le caractère public de la crise permet aujourd'hui à certaines équipes militantes d'exprimer une critique à une plus large échelle de l'orientation de la CGT.
Notre responsabilité dans la construction du rapport de force partout où nous sommes
Certes, cette journée vient bien tard. Certes, il va falloir combattre le sentiment d'une partie des militants et des travailleurs, que c'est encore une journée de mobilisation « sans lendemain » donc peu utile. Mais cette journée de grève interpro et unitaire est la première depuis plus d'un an (18 mars 2014). Nous ne pouvons faire en aucun cas la fine bouche, il faut mobiliser au maximum pour le 9 avril, convaincre de l'enjeu, vaincre le scepticisme d'une partie des équipes militantes, emporter le maximum d'appels à la grève (notamment dans certains secteurs clés où ce n'est pas gagné, comme à la SNCF puisque les organisations syndicales du secteur sont focalisées sur d'autres journées spécifiques au rail contre la suite de l'application de la réforme ferroviaire). Mais même aussi dans l’Éducation Nationale au vu de la timidité pour l'instant de l'appel de la FSU. Concernant la volonté de l'appareil confédéral de la CGT de privilégier une manifestation nationale à Paris plutôt que des manifestations « décentralisées », il nous semble important d'argumenter autour de nous et auprès des autres militants syndicalistes (et notamment ceux de la CGT qui peuvent être tentés par une démonstration de force militante après la crise interne au moment de la succession de Le Paon) qu'il faut privilégier pour cette première journée de grève et de manifestation depuis des lustres, le nombre de gens qui seront dans la rue ce jour-là. Et du coup, la manifestation à Paris est une marche beaucoup trop haute pour l'immense majorité des salariés qui auront envie de défiler ce jour-là.
Nous devons alimenter l'idée que le 9 avril doit être l'occasion de faire converger toutes les colères contre la politique d'austérité et pro-medef du gouvernement : tout le monde ou presque est contre lui parce qu’il mène une politique en faveur d’une toute petite minorité, il faut que cela s'exprime enfin ! C'est pourquoi pour le 9 avril – et sa suite - nous pouvons pousser de toutes nos forces en sachant que nous pouvons compter sur le soutien de ceux qui avaient dénoncé l'attitude de la CGT dans le Dialogue social, en cherchant même ce soutien dans ce que nous disons, avec la toile de fond de la colère générale montante qui pousse elle-même ces militants.
Sur la loi Macron, et demain la refonte des IRP par voie législative, nous devons continuer à être à l'offensive même si les travailleurs, par ailleurs peu informés, pensent qu'il est plus difficile de gagner sur le retrait de la loi Macron que sur les salaires. Nous devons lier ces attaques de la loi Macron, du Dialogue social, ce qui se passe dans la CGT avec les mouvements sur les salaires, les conditions de travail, les licenciements. La colère est générale, nous devons la faire entendre. En contribuant à la faire entendre, nous nous transformons de fait en porte-paroles de millions de travailleurs et gagnons leur confiance... pour la suite.
Mettre le parti en situation de jouer un rôle dans la réussite du 9 et préparer la suite
Outre la propagande générale de parti que nous pourrons faire pour la réussite du 9 avril (en ayant une série de tracts qui rythment la préparation de la mobilisation dans le mois qui précède, un bandeau appelant à la grève et à l'affrontement contre le gouvernement à coller sur les affiches Macron, des interventions de nos porte-paroles dans les médias, des états des lieux de la préparation de la mobilisation dans les différentes régions), nous devons partout où des camarades sont en capacité de le faire essayer de dépasser le strict cadre d'une simple journée de mobilisation.
Cela suppose plusieurs choses : faire des assemblées générales, des heures d'information syndicale, en amont du 9 et le 9, militer pour des réunions intersyndicales de mobilisation, à l'échelle des boîtes, mais aussi des villes voire des départements, proposer des diffusions de tracts unitaires dans les semaines qui précèdent, organiser des réunions publiques de sensibilisation et de dénonciation de la loi Macron. Mais aussi dans un petit nombre de secteurs où nous tentons de construire avec d'autres militants une direction alternative au directions syndicales et des structures embryonnaires d’auto-organisation (comme par exemple à la Poste depuis la réunion de Coordination « nationale » du 14 février dernier qui a permis de faire émerger un pôle de regroupement Sud- CGT ou dans la santé avec « Convergence contre l'Hôstérité), nous devons profiter du 9 avril pour monter d'un cran dans le regroupement des secteurs en lutte. Cela peut passer par la construction dans les manifestations de pôles combatifs interprofessionnels et de cortèges de secteurs pour dépasser la division syndicale.
C'est en défendant l'idée que le 9 doit être une première étape, dans la reconstruction d'un rapport de forces, en défendant l'idée de la convergences des luttes, que nous serons les meilleurs militants du 9 avril. C'est bien sûr le nombre de gens en grève et dans la rue qui sera décisif pour faire pression sur les appareils syndicaux pour qu'ils ne rangent pas les banderoles pour encore une année. Mais politiquement, si nous pouvons aider à ce que le ras-le-bol généralisé s'exprime clairement dans une volonté d'affronter le gouvernement nous marquerons quoiqu'il arrive des points pour la suite.
III- Contre l'union nationale et tous les racismes,
contre l'offensive liberticide du gouvernement
et sa nouvelle offensive guerrière
Il n'y aura pas de miracle ni de raccourci pour faire reculer les idées nauséabondes véhiculées par la politique d'union nationale et la politique répressive, sécuritaire et guerrière du gouvernement. Seule une mobilisation d'ensemble du monde du travail et de la jeunesse, luttant ensemble, par-delà leurs différences, pour leurs droits et leurs revendications sera capable de le faire. La situation actuelle exige que nous soyons capables de mener campagne sur trois axes :
- Le renforcement du racisme : un problème majeur pour notre camp social
Il y a une vague islamophobe sans précédent : après le 7 janvier, il y a eu autant d’agressions en un mois que pendant un an. D’après le Conseil de l’Europe, 80% de ces actes se font contre des femmes. L’antisémitisme ne recule pas, au contraire. L’identification par les sionistes et leurs soutiens (en premier lieu Hollande) avec l'Etat d’Israël nourrit l'antisémitisme, en particulier chez les populations d'origine arabe et chez les musulmans. Cependant il serait abusif d’attribuer l'antisémitisme uniquement aux jeunes des cités, fils et petits-fils d’immigrés musulmans. L’un des actes antisémites les plus répugnants depuis des années (la profanation massive de tombes en Alsace) a été le fait de jeunes blancs qui n'avaient peut-être pas de liens directs avec l'extrême droite mais qui vivaient dans une région où celle-ci est très implantée traditionnellement et où l'antisémitisme (y compris avec violences) a été récurrent au cours des derniers siècles.
Le NPA a décidé le mois dernier de mener une campagne de propagande contre l'union nationale et contre tous les racismes. Il est urgent de mettre en oeuvre cette campagne afin de répandre d'autres sons de cloches que ceux du gouvernement, des médias à son service et des racistes de tout poil, dont le but est d'engendrer des divisions artificielles dans notre camp social pour l'affaiblir. La journée internationale de mobilisation contre le racisme du 21 mars est une échéance importante dont le NPA doit contribuer à la réussite. Plusieurs manifestations, dont la principale à Paris sont déjà prévues, il faut faire en sorte que partout où nous avons des comités, ceux-ci répondent massivement aux appels de manifestations unitaires ou les impulsent si aucun cadre unitaire ne se met en place.
- Une nouvelle offensive guerrière de notre impérialisme contre les peuples
Hollande s’est appuyé sur l’ambiance post-Charlie pour renforcer ses menées guerrières en Irak et autour de la Lybie. Il bénéficie de la complicité de toute la gauche parlementaire, dont aucun député n'a voté contre les crédits de guerre supplémentaires pour la présence française en Irak.
- Une offensive sécuritaire et liberticide sans précédent
Sur plan budgétaire, il y a un projet donnant la possibilité de fermeture administrative de sites internet.
Mais un secteur occupe une place particulière dans cette offensive : l’Education nationale.
Ce secteur est sous pression et fonctionne à flux tendu depuis des années. Hollande en avait fait sa priorité de campagne en termes de créations de postes notamment. Il n’aura distribué que des queues de cerise. Mais s’il a pu faire illusion, désormais, entre les nouveaux rythmes scolaires et le déclassement des zones d’éducation prioritaire, une partie du milieu enseignant refuse de continuer à courber l’échine. L’éducation nationale va donc servir de terreau idéologique au gouvernement qui sous couvert de lutte contre le djihadisme et d’intérêt pour l’avenir des jeunes, est en train de mettre en place pour la prochaine rentrée, une véritable machine à délation et indigestion républicaine. Ainsi, un des éléments du livret Grande mobilisation de l’école pour les valeurs de la République invite les enseignants à se faire les indicateurs, directement auprès du procureur (!) de comportements jugés déviants ou asociaux de certains enfants.
C’est donc dès maintenant qu’il faut préparer le terrain auprès des collègues :
- en refusant l’enseignement de la « morale laïque»
- en refusant le moindre signalement d’élèves à la police ou la justice sous prétexte d’atteinte aux valeurs de la République
- en construisant la grève du 9 en la liant aux revendications propres du secteur dont les postes, les rythmes et les salaires.
Cet axe de campagne contre cette offensive liberticide et sécuritaire doit se combiner avec la tentative systématique d’entraîner dans l'action autour de ces questions, contre la répression à La Poste, l'encadrement de la jeunesse lycéenne et étudiante, ou encore les violences subies par les militant-e-s.
IV- La place du NPA dans la situation politique :
plus que jamais construire un parti anticapitaliste et révolutionnaire
Ce conseil politique national (CPN) est le premier après le 3ème congrès de notre organisation, un congrès qui a laissé le NPA sans majorité de direction, ce qui conduit à garder ouvertes une série de questions essentielles concernant les fondamentaux de notre orientation dans la situation. Cette dernière confirme pourtant la nécessité d'avancer dans la construction d'une force révolutionnaire, à même de s'adresser à celles et ceux qui lutte en leur proposant une stratégie pour gagner et une expression politique indépendante de la classe ouvrière, de la jeunesse et du reste des opprimés. Une force dont l'absence à l'étape actuelle pèse cruellement sur la possibilité de transformer la combativité exprimée par les luttes en cours en une véritable capacité de changer le rapport de force.
Ce sont les reculs sociaux, la politique d'union nationale et les trahisons des directions qui renforcent le Front National
Comme on l'a souligné, Il est très probable que les scores du Front national aux élections départementales soient très élevés et que le FN obtienne un nombre d'élus significatifs dans les conseils généraux malgré le mode de scrutin majoritaire à deux tours. Néanmoins, Une grande partie des classes populaires n'ira pas voter les 22 et 29 mars prochain dégoûté par la politique anti-sociale du PS, une autre partie fera hélas le choix de voter contre son camp en choisissant le vote FN. Très peu auront la possibilité de voter pour des candidats d'extrême gauche (le NPA sera quasiment absent de ces élections, tout comme LO qui ne se présente que dans une dizaine de cantons). Se maintient donc une situation dans laquelle il n'existe pas pour les travailleurs et les classes populaires de canal d'expression significatif de leur colère au sein du mouvement ouvrier La progression du FN sur le plan électoral sera combattue efficacement par le retour en force des luttes sociales et des victoires du monde travail face au patronat.
Le Front de gauche en difficulté, comme toutes les alternatives politiques institutionnelles
Le Front de gauche est de plus en plus divisé, notamment dans sa stratégie électorale (par rapport au parti socialiste et EELV), et il n'apparaît plus du tout comme un espoir de changement radical aux yeux d'une fraction des salariés et des électeurs déçus par le PS. Pour le NPA, il est vital de réaffirmer qu'il n'a rien à voir avec les tentatives de raccommodage institutionnel entreprises par le PCF ni avec les appels à « marcher pour la 6ème République » de Mélenchon. Ces deux partis politiques ont sans aucun doute des stratégies électorales différentes et à géométrie variable (si on regarde la manière dont ceux-ci se présentent aux élections départementales, c'est plus que jamais « illisible ») mais ils restent des adeptes invétérés du changement par les urnes.
C'est pour cette raison que la participation du NPA au collectif 3A reste un problème dont le CPN doit rediscuter car ce collectif est bien plus une tentative de recomposition d'une énième mouture d'une gauche institutionnelle se posant comme une alternative gouvernementale au social-libéralisme qu'un cadre de mobilisation de front unique. Depuis la manif du 12 avril dernier, le cadre 3A n'a produit qu'une pétition contre la loi Macron et quelques meetings contre celle-ci (avec un meeting parisien le 7 avril, dont on voit bien que seulement 2 jours avant le 9, il ne peut pas servir à mobiliser sérieusement). Notre combat pour l'unité d'action est inséparable de l'expression de nos objectifs, qui sont ceux de la généralisation des grèves, de l'auto-organisation, et de l'émergence d'un gouvernement des travailleurs.
Plus que jamais, construire et renforcer le NPA, en toute indépendance de classe
Le NPA doit apparaître comme un parti qui n'a rien à voir avec les forces politiques traditionnelles, dont les classes populaires se détournent, par méfiance et par dégoût. Nous ne voulons pas construire un Syriza ou un Podemos « à la française », et nous devons être capable de dialoguer avec le monde du travail et la jeunesse sur la base de l'expérience qui est en train de se dérouler sous nos yeux en Espagne et en Grèce. Face à l'attraction qu'exerce le Front national sur une partie de notre camp social, il est urgent d'avancer dans la construction d'un véritable parti défendant les intérêts politiques des travailleurs et utile à l'expression de la colère sociale et aux luttes.
Nous devons nous construire, nous implanter que ce soit géographiquement ou dans certains secteurs professionnels où nous manquons cruellement de militant-e-s, en favorisant les apparitions propres de notre pari dans toutes les circonstances. Il faut relancer une campagne de réunions publiques dont les axes d'intervention pourraient tourner autour de 3 thèmes principaux :
- la solidarité avec le peuple grec,
- l'appel à la mobilisation et à la convergence des luttes des salariés et de la jeunesse pour battre en brèche le carcan de l'union nationale,
- la lutte contre tous les racismes et le Front national en développant la nécessité d'un mouvement d'ensemble et en mettant en avant nos réponses anticapitalistes à la crise du système.
Résolution politique pour le CPN des 14 et 15 mars
présentée par le courant A&R et le CCR
Rejetée (30,7 % pour ; 55,7 % contre ; 13,6 % abstention)
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