Ça y est ! Depuis dimanche 20 novembre, la grande fête du foot est déclarée ouverte. Pour des millions de passionnés du ballon rond, assister aux performances des meilleurs joueurs du monde reste un évènement immanquable. Leur enthousiasme dans l’attente du spectacle, ou a contrario les appels au boycott émanant de personnalités de la culture, de la politique ou du sport, ne sauraient constituer le coeur de la discussion, comme tentent bien habilement de le poser les commentateurs avides de débats inutiles. C’est en fait bien plus grave que cela : oui le football est un jeu, mais entre les mains des capitalistes, il devient comme chaque chose une marchandise usant de tout ce qui lui est permis pour engranger des sous et encore des sous.
Des gazons rouges du sang de l’exploitation
Transformer un désert en plusieurs terrains de foot est une ineptie qui allonge la liste de la longue gangrène capitaliste qui ronge nos vies : en mars 2021, Oxfam France indiquait que l’empreinte carbone des entreprises du CAC40 s’élève à 4,1 tonnes de CO2 à chaque fois qu’elles réalisent 1000 euros de chiffre d’affaires, soit à peu près 2 fois ce qu’un habitant ou une habitante de la France devrait émettre par an. Sachant que le seul chiffre d’affaires de Total en 2021 est de 181 milliards de dollars. Et que dire des bassines en France qui privatisent l’eau des cultures, ou des aéroports inutiles ?
Mais ce qui a enflammé la toile, c’est le sort des migrants. Ils représentent près de 90% des 2,8 millions d'habitants de l'émirat. Ils viennent du Népal, d'Inde et du Pakistan, et comme partout ils viennent grossir les rangs des prolétaires qui se déplacent en fonction des besoins des capitalistes et de leurs propres besoins de survie.
Ce gazon aura l’odeur du sang, des soupçons de corruption dans l’attribution de la compétition, des conditions de vie indigentes des travailleurs étrangers. Mais il est aussi teinté de toute l’amitié entre l’émirat et l’État français : contrats gaziers, ventes d'armes, rachat du PSG, entrée au capital d’entreprises du CAC 40…
Les travailleurs on s’en fout, on veut juste gagner des sous !
Sérieusement, aura-t-il fallu attendre la Coupe du monde au Qatar pour réaliser que le football professionnel est pour tous les dirigeants de ce monde une énorme manne de fric ? En 2019, les vingt clubs de football les plus riches au monde ont généré un chiffre d'affaires record de 9,3 milliards d'euros.
Et les migrants dans tout ça ? Il aura fallu attendre une semaine pour que le gouvernement Macron autorise l’Ocean Viking à accoster à Toulon. Une fois débarqués, les migrants et migrantes ont été triés, une cinquantaine pouvant rester en France, les autres ayant été dispersés aux quatre coins de l’Europe ; vingt-sept migrants se sont noyés dans les eaux de la Manche il y a un an, parce que les autorités ont refusé de les sauver. Voilà toute la déshumanisation dont se montre capable le même État qui ferait la leçon au Qatar. Nos dirigeants ferment les frontières et chassent les étrangers, en France où pas un bâtiment, public comme privé, ne serait construit sans la sueur de travailleurs étrangers, où pas un seul hôtel de luxe ne brillerait sans le labeur des travailleuses étrangères.
Cerise sur le gâteau, le ministre de travail Olivier Dussopt et celui de l’intérieur, Gérald Darmanin viennent de pondre un projet de loi qui sera examiné en 2023 et qui se donne pour objectif la création d’un titre de séjour spécial « métiers en tension » pour les travailleurs sans-papier déjà présents et des mesures afin d’améliorer les reconduites à la frontières !!
Alors oui depuis dimanche, des fans de foot regardent les matchs, d’autres les boycottent, d’autres encore n’en ont rien à faire. Mais au final, nous devrons toutes et tous être ensemble pour dézinguer ce gouvernement Macron et tous ses amis, du Qatar et d’ailleurs, dont les lois répressives, la chasse aux immigrés et la guerre sociale, se jouent sur tous les terrains et les gazons de la planète !