Plusieurs milliers de tués/ées et de blessés/ées, des centaines de milliers de personnes sans abri, ni eau ni électricité, des villes en ruine, des routes détruites, des communications coupées, des hôpitaux saturés, c’est le triste bilan provisoire du puissant séisme qui a ravagé le Népal, notamment la vallée de Katmandou, samedi 25 avril. Les sismologues parlent d’un possible bilan final de 10 000 morts/es, notamment en raison des nombreuses répliques attendues. Ces mêmes sismologues avaient d’ailleurs prévenu de l’inéluctabilité d’un grave tremblement de terre dans ce pays situé sur une des failles majeures de la planète, donc touchée de manière cyclique par des séismes meurtriers.
Et pourtant, aucune norme antisismique n’a été respectée pour les constructions en ciment issue de l’urbanisation galopante des dernières décennies. Sans parler de la vétusté de l’habitat traditionnel datant souvent de plusieurs siècles... La plupart des habitations se sont écroulées comme des châteaux de cartes. Interrogée par Le Monde, une Française résidant sur place annonce sans détours : « c’est un tremblement de terre qui va faire beaucoup de morts, mais surtout chez les pauvres. Les constructions des nantis de la vallée ont résisté au choc ».
Le Népal est l’un des centres mondiaux du tourisme de masse, aux mains des grandes multinationales du secteur. Les adeptes du trek et de l’escalade à grand renfort de logistique ultra sophistiquée voient le Népal comme un eldorado alors que la misère la plus criante s’étale à chaque coin de rue. Plus d’un tiers des 28 millions d’habitants/es vit sous le seuil de pauvreté, et l’espérance de vie n’y dépasse pas 68 ans. Déforestation et pollution accélérées par le tourisme, augmentation du coût de la vie pour les habitants/es confrontés à l’irruption des denrées alimentaires importées, prolétarisation des paysans contraints à devenir porteurs au service des tour-opérateurs, surexploitation des ouvrières dans les usines textiles travaillant pour les grandes marques occidentales... les ravages de l’économie capitaliste mondialisée sont légions dans ce pays qui voit avec ce séisme une nouvelle plaie s’ouvrir. Et cela n’a rien à voir avec la fatalité.
Marie-Hélène Duverger
dans l'hebdo L'Anticapitaliste n° 287 (30/04/15)