Des feux de forêt massifs ont perduré pendant plus de deux mois en Indonésie. Ces incendies ont créé d’immenses fumées et brouillards. Ils ont provoqué une pollution atmosphérique intense : un manque de visibilité et de graves problèmes respiratoires pour 500 000 personnes dans cinq provinces indonésiennes avec plusieurs dizaines de morts à ce jour, sans parler de l’impact sur la faune et la flore des forêts tropicales.
Le trafic aérien a été perturbé en Thaïlande et aux Philippines. Parce que la population des pays voisins a également été touchée, les incendies dans les îles de Sumatra et Kalimatan (Bornéo) ont créé des conflits diplomatiques avec la Malaisie et Singapour, par contre ceux de Papouasie occidentale sont restés dans l’ombre.
Ces feux sont utilisés par la culture sur brûlis pour défricher afin de laisser la place à la culture de palme pour l’huile et la pâte à papier. Les sols de tourbière sont drainés, et en s’enflammant sont la principale source des émissions de fumées et de carbone. Les responsables seraient les petits planteurs et les entreprises qui exploitent l’huile de palme. Il semblerait que la moitié des départs de feux l’aient été à l’intérieur des concessions des compagnies. Le géant indonésien du papier Asia Pulp and Paper se défend d’ailleurs d’être responsable sur son territoire. Dix entreprises et cent individus, dont des cadres de sociétés, seraient poursuivis par l’État indonésien.
Incendie criminel
Premier producteur de palmiers dans le monde, l’Indonésie produit 44 % de l’huile de palme. À Kalimantan, les dossiers de concessions foncières et forestières viennent de partir en fumée dans l’incendie criminel du bureau des finances et de l’économie de la région. À Sumatra, le gouvernement local a incité, et a lui-même vendu plusieurs millions d’hectares. Il est à supposer que les transactions ne sont pas exemptes de corruption...
Fin février, dans la province de Jambi dans le centre de Sumatra, un jeune membre de l’union des fermiers a été attaqué, battu et tué par les agents du service de sécurité d’une filiale de l’entreprise APP alors qu’il circulait en moto pour aller sur son champ de riz. Des conflits locaux violents sont nombreux en Indonésie à cause de l’attribution de concessions (minières, forestières, agricoles) par l’État à des entreprises privées sans respect des droits des communautés locales.
Les responsables sont également les entreprises consommatrices des produits issues de la culture des palmiers mais également les investisseurs tels les banques, les fonds de pension ou de gestion d’actifs. Toutes celles qui affichent par ailleurs des comportements d’« entreprise socialement responsable »...
Christine Schneider
dans l'hebdo L'Anticapitaliste n° 311 (12/11/15)