« Injustifiable », a titré Le Parisien. « L’œuvre de voyous », a déclaré Manuel Valls, et même la « chienlit » selon Nicolas Sarkozy, qui se prend pour de Gaulle... « Irresponsables », a twitté de son côté Emmanuel Macron. « Inadmissible », a ajouté le ministre des Transports Alain Vidalies. De quoi parlent-ils donc ? De la réunion du comité central d’entreprise d’Air France du 5 octobre, sans doute ?…
Patrons voyous
Car effectivement, seuls d’irresponsables voyous pourraient supprimer 2 900 emplois, alors que 15 000 l’ont déjà été depuis 2011. Seule la chienlit pourrait exiger l’inadmissible en demandant aux salariés de voir leurs revenus baisser de 20 % tout en augmentant leur temps de travail de 20 %.
C’est vrai que de telles mesures sont injustifiables, alors qu’Air France ne perd pas d’argent. Le but de ces plans est simplement de faire passer le « rendement de l’action » de 3,5 % à 12 % d’ici 2017. Autrement dit, d’enrichir davantage les actionnaires, ceux qui gagnent de l’argent en dormant, au détriment des travailleurs et des travailleuses qui créent réellement les richesses.
Mais les politiciens et la presse patronale n’ont pas un mot de compassion pour ceux et celles qui voient leurs vies partir en lambeaux, et pas seulement leurs chemises. Au contraire, Valls, Macron et bien d’autres, au PS comme chez Les Républicains, se sont empressés d’exprimer tout leur « soutien à la direction d’Air France ».
État complice
Ces politiciens ne témoignent pas seulement de la compassion pour les deux cadres qui ont été chahutés. Ils soutiennent bel et bien leurs actions, celles qui consistent à exploiter et à jeter les salariés comme de vieilles chemises.
D’ailleurs l’État est encore actionnaire à 16 % de la compagnie aérienne : il pourrait exprimer son désaccord. Or il n’en est rien. Il a soutenu la nomination du P-DG, Alexandre Marie Henry Begoügne de Juniac, et le soutient encore. Il soutient sa rémunération annuelle fixe de 600 000 euros, sans compter les diverses primes et les revenus annexes.
En décembre 2014, Juniac a pris la parole lors de rencontres patronales, à propos des acquis sociaux. Il s’y est interrogé sur la notion d’interdiction du travail des enfants (rien que ça !), avant d’expliquer, sous les rires et les applaudissements de ses homologues, qu’au Qatar, les grévistes sont envoyés en prison. Voilà de quoi rêve le patronat !
Et le gouvernement Hollande-Valls n’a de cesse, depuis trois ans et demi, de réaliser un à un les rêves du Medef ! Ce lundi, six salariés d’Air France ont été arrêtés comme des criminels et placés en garde à vue. Quoi qu’en dise le gouvernement, la lutte des classes est toujours d’actualité : il a d’ailleurs choisi son camp en protégeant les intérêts du patronat et en l’aidant à satisfaire sa soif de revanche. Notre camp, c'est celui des travailleurs qui veulent défendre leur emploi. Montrons-le en exprimant notre solidarité avec les salariés arrêtés d’Air France. Exigeons l’abandon de toutes les poursuites !
Comme à Air France, préparons l’affrontement !
Indigné, Sarkozy a déclaré : « On n’est pas en 1793. On ne peut pas accepter que deux dirigeants soient au bord de se faire lyncher par des hommes en tenue de syndicaliste... ». Mais face à un patronat qui veut faire revenir nos droits deux ou trois siècles en arrière, nous avons bien besoin de construire l’affrontement !
Les grèves sont nombreuses dans l’Éducation, les hôpitaux, les collectivités et les entreprises privées, pour l’emploi, les salaires et les conditions de travail... Le 8 octobre, une journée de grève et de manifestation a réuni plusieurs dizaines de milliers de travailleuses et de travailleurs dans les rues.
Pour faire tomber le pouvoir patronal, et pas seulement ses chemises, ce sera sans doute une autre paire de manches. Mais chaque bagarre, chaque petite lutte victorieuse dans une boîte, montre que le camp social des exploités ne se laisse pas abattre facilement. N’en déplaise à Juniac, Hollande, Valls ou Sarkozy !