Rien pour notre santé, tout pour le patronat...

Pressions contre le droit de retrait, milliards débloqués pour les entreprises, vannes ouvertes de l'activité partielle... tout est bon pour sauver les profits. Pendant ce temps-là, nos vies sont en danger. Nous devons imposer nos solutions !

Le gouvernement cherche à encourager à tout prix la poursuite la plus normale possible de l'activité économique, et clame haut et fort son mot d'ordre d'unité nationale.

Dès le 17 mars, alors que le confinement était annoncé, Castaner, donnait des instructions aux préfets insistent sur la nécessité de la poursuite de l’activité économique : "Je tiens donc à rappeler que si les mesures de restrictions doivent être strictement respectées, elles ne doivent pas aboutir à dissuader nos concitoyens de poursuivre leur activité, hormis pour les commerçants impactés par les interdictions d’ouverture." 

En réalité, ce sont principalement les ouvrières et ouvriers et tous les employés de base, caissières, livreurs, manutentionnaires, ouvriers postés des usines, bref, la classe ouvrière dans son ensemble, qui est appelée à s'exposer tous les jours au virus en allant travailler pour que leurs patrons puissent continuer à faire du profit.

Pression patronale contre le droit de retrait

Une pression énorme est exercée pour empêcher les salariés d'exercer leur légitime droit de retrait. Dans de nombreuses grandes entreprises, les directions expliquent à leurs salariés qu'elles leur retireront du salaire s'ils exercent ce droit. La direction de La Poste est allée jusqu'à adresser aux salariés une lettre de Bruno Le Maire affirmant avoir rencontré le Président du groupe et s'être directement assuré auprès de lui que les salariés étaient bien protégés, qu'ils n'avaient donc pas de raison d'exercer leur droit de retrait...

Le ministère du Travail, bien souvent aux abonnés absents pour éditer des guides juridiques accessibles et complets, a, dès le début du confinement, mis en ligne sur son site un « questions - réponses » pour les entreprises afin de leur expliquer qu'à partir du moment où elles prenaient des mesures pour faire respecter les gestes barrières, elles pouvaient être assurées du fait que leurs salariés n'avaient pas le droit d'exercer leur droit de retrait. Pourtant, seuls les juges sont compétents pour apprécier si le droit de retrait est légitime, et, rappelons-le, celui-ci peut être exercé dès qu'un salarié a « un motif raisonnable de penser » qu'une situation présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que dès qu'il constate une défectuosité dans les systèmes de protection.

Alors, n'en déplaise au patronat, protégeons-nous, partout, et exerçons collectivement notre droit de retrait !

45 milliards pour les entreprises

Pendant que le gouvernement organise la pression pour pousser les salarié·es à aller bosser, il débloque des milliards pour sauver les profits. C'est toujours la même logique en cas de crise du système capitaliste : socialiser les pertes, privatiser les profits.

Mardi 17 mars, sur RTL, le ministre de l’Économie, Bruno Le Maire a officialisé un plan de soutien de 45 milliards d’euros pour aider les entreprises. Le déficit public va exploser : la dette sera supérieure à 100 % du PIB. 

Il n'y avait pas d'argent disaient-ils pour sauver l'hôpital public quand les soignants étaient en grève et dans la rue. Et soudainement, paf, on ouvre les vannes de l'argent public !

Le chômage partiel pris en charge à 100 %... pas par les patrons, bien sûr 

La ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a rapporté que 220 000 entreprises étaient entrées vendredi 27 mars  dans le dispositif de chômage partiel. Pour les 2,2 millions de salariés concernés, c'est une perte de salaire conséquente, l'employeur ne versant que 70 % du brut soit environ 84 % du net au salarié.

Pour le patron en revanche, aucune perte, Muriel Pénicaud a annoncé dès le début de la crise que l'État  prendrait en charge intégralement le chômage partiel alors qu'il n'était auparavant remboursé qu'à hauteur du SMIC. « Nous allons le prendre en compte sur le budget du ministère du Travail. » Notre argent donc, celui que nous versons pour alimenter le budget de l'État quand nous faisons des courses, via la TVA, va donc servir à financer cette vanne ouverte de l'activité partielle.

Sans aucun contrôle sur l'utilité réelle de cette dépense. D'après nos informations, il n'y aurait eu que 28 refus en tout et pour tout au niveau national. Tout est fait de toute façon pour que les demandes soient accordées sans regarder vraiment les dossiers. Les services des Direccte qui traitent ces demandes sont débordés. Et ils doivent les traiter en 48 heures. À défaut de réponse dans ce délai, la demande est acceptée. Et ce mécanisme est prévu pour durer jusqu'au 31 décembre 2020 !

« On a mis en place un système très protecteur et notre but c’est qu’on évite au maximum les licenciements » a expliqué Muriel Pénicaud. On pourrait rire  de cette apparente naïveté si ce n'était pas en réalité du cynisme, avec des conséquences dramatiques pour notre classe. 

On sait bien que les licenciements, on ne pourra les éviter qu'en les interdisant, avec un rapport de force, des mobilisations. Rien n'empêche un employeur de continuer de licencier actuellement et surtout, rien ne l'empêchera de le faire massivement après la crise sanitaire. Après donc s'être gavé de fonds publics pendant des mois.

Car le dispositif de chômage partiel a d’ores et déjà coûté 4 milliards d’euros aux finances publiques et au total, 8,5 milliards d’euros ont été fléchés à cette fin, mais Bruno Le Maire a déjà indiqué que ce ne serait pas suffisant.

Autre cadeau au patronat : le report des « charges »

Les entreprises vont pouvoir bénéficier d’un report de leurs cotisations « sur simple mail » à l'Urssaf. Ce report de paiement des cotisations sociales des entreprises, évalué pour mars et avril à 32 milliards d’euros, va en réalité constituer une annulation pure et simple des versements pour toutes les entreprises qui ne se relèveront pas de la crise et il est fort probable qu'elles soient nombreuses.

Le droit du travail mis à mal

Par ailleurs, la loi d'urgence sanitaire du 23 mars, suivie des ordonnances du 25 mars 2020 ont organisé la suspension de l'application de dizaines d'articles du Code du travail en matière de congés, de prise de RTT, de durée du travail.  Il est dorénavant permis aux entreprises d'imposer aux salariés jusqu'à 10 jours de RTT ou de jours pris sur leurs comptes épargne-temps aux dates choisies par l'employeur, sur simple décision unilatérale, et jusqu'à 6 jours de congés payés, par accord d'entreprise.

En outre, dans tous les secteurs "particulièrement nécessaires à la sécurité de la nation et à la continuité de la vie économique et sociale" (un décret fixant la liste des secteurs est encore en attente à l'heure où nous écrivons), jusqu'au 31 décembre 2020, certains travailleurs pourront faire jusqu'à 12 heures par jour, 60 heures par semaine, et n'avoir que 9 heures de repos !

Imposons notre plan d'urgence !

Pendant que des milliards sont donnés aux entreprises, d'ores et déjà budgétisés et chiffrés précisément, pendant que les patrons sont autorisés à exploiter plus librement avec les congés imposés et la hausse de la durée du travail, les hôpitaux - et tout le personnel qui y soigne avec acharnement - restent en souffrance.

Pour les salaires des soignants, pour la fabrication de masques, de tests, de respirateurs, bref, pour combattre réellement le virus, qu'est-il prévu ?

Macron a promis « un plan massif » pour l’hôpital lors de son discours depuis l'hôpital militaire de campagne de Mulhouse. Des promesses donc mais aucun détail des montants ni des modalités concrètes. A peine a-t-il évoqué que les heures supplémentaires effectuées seront majorées sous forme d'une prime exceptionnelle... De qui se moque-t-on ? Un plan massif pour l'hôpital ? Cela veut dire concrètement qu'on paiera les heures de travail réalisées ?... Et bien en fait non, même pas, puisque ce sera sous forme de prime, c'est-à-dire pas vraiment du salaire (on ne cotise pas pour la retraite sur ses primes dans la fonction publique).

Alors face à ce gouvernement qui montre depuis le début de la crise du coronavirus de la façon la plus claire qu'il est au service des patrons, des profits et du système capitaliste, imposons notre plan d'urgence :

  • Pour tous les salariés en danger sur leur lieu de travail, droit de retrait !

  • Arrêt immédiat des productions non essentielles, maintien intégral des salaires financés par les entreprises

  • Réquisition sous contrôle ouvrier pour organiser la réorientation de la production afin de faire des masques, des tests, des respirateurs, du gel hydroalcoolique, des gants, des blouses, des lits d'hôpitaux supplémentaires, etc.

Nos vies valent plus que leurs profits !

Camille Deceaux



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