[Etat Espagnol] Plan d'urgence sociale pour que les travailleurs et les jeunes ne paient pas la crise du coronavirus

Nous reproduisons ici la traduction du dernier communiqué de IZAR1 concernant la situation dans l'Etat espagnol, quatrième pays au monde le plus touché par le COVID-19, où les salariés résistent face à des vagues de licenciements sans précédents.

La crise provoquée par le coronavirus ne peut pas retomber sur les épaules des travailleurs, bien que les employeurs tentent déd'y parvenir. La situation exceptionnelle en Espagne et dans d'autres parties du monde, ainsi que les conséquences de l'extension de la pandémie déreconnue en Chine, sont utilisées pour licencier et piétiner les droits des salariés, comme le fait de forcer les travailleurs à prendre des vacances pendant ces journées, à travailler sans sécurité, etc.

Ainsi, de grandes entreprises de différents secteurs (Ikea, Iberia, Ryanair, Burger King, Melia Hotels, Seat, Ford, Michelin ...) ont déannoncé des licenciements. De même, de nombreux employés sont contraints de travailler, sans conditions minimales de sécurité, alors que leurs entreprises n'ont rien à voir avec les produits de première nécessité. Heureusement, les travailleurs se lèvent et s'organisent décomme dans l'usine Mercedes-Benz de Vitoria et, comme cela s'est déproduit en Italie, ils font valoir leur droit de quitter leur emploi afin de préserver leur intégrité physique. Notre santé vaut plus que leurs profits.

Face à la crise du coronavirus, les travailleurs se dirigent à nouveau vers une situation de chômage et de précarité accrue, comme ce fut le cas lors de la crise de 2008. Assez de voir toujours les crises payées par les mêmes personnes. Nous ne pouvons tolérer que des entreprises comme SEAT (qui a réalisé un bénéfice record de 248 millions d'euros en 2019 et appartient au groupe Volkswagen, qui a enregistré un bénéfice net de 11,154 milliards sur la même période), comme Ford (6,4 milliards de dollars de bénéfice en 2019) ou comme Michelin (844 millions d'euros de bénéfice au premier semestre 2019) fassent des licenciements.

Quelqu'un croit-il en son bon sens que ces entreprises ne peuvent pas se permettre de payer leurs travailleurs pendant 15 jours ou un mois, sans faire faillite ? Des entreprises qui, année après année, accumulent des milliards de bénéfices. Ce n'est pas le problème. La réalité est que ces entreprises veulent continuer à augmenter leurs profits et c'est pourquoi elles profitent de cette crise pour licencier des travailleurs. Nous devons nous y opposer dans toutes les entreprises et exiger que les grandes fortunes paient. La solution du gouvernement PSOE-UP, des employeurs ou de la direction des centrales syndicales CCOO et UGT n'est pas bonne pour nous. Si c'est l'Etat qui assure les prestations des travailleurs en situation de chômage et non les grandes fortunes, dans quelques mois ils nous diront que la grande dépense effectuée par l'Etat hier, nécessite aujourd'hui de nouvelles politiques d'ajustements et de coupes pour équilibrer les comptes... à nouveau des coupes contre les services publics. Ce cercle vicieux doit être arrêté immédiatement. Que ceux qui sont toujours riches paient, qu'il y ait une crise ou non.

La crise économique de 2008 a été payée par les travailleurs

Les employeurs, qui demandent aujourd'hui de l'aide et des facilités de licenciement, sont les mêmes qui nous ont dit en 2008 que nous devrions tous nous serrer la ceinture (sauf eux) ou qu'ils étaient contre la montée du SMIC et le contrôle du temps de travail et de la rémunération des heures supplémentaires, mais qui se sont néanmoins enrichis au cours de cette décennie de manière insultante. Comme ce fut le cas en 2008 avec le sauvetage des banques avec l'argent public que les institutions financières n'ont jamais rendu (plus de 65 milliards d'euros), ils demandent une fois de plus une injection d'argent public pour se sauver et laisser la classe ouvrière en plan.

Les faits parlent d'eux-mêmes : les entreprises côtées à la Bourse de l'IBEX 35 ont gagné 11,3 % de plus depuis 2008, et 16,2 % en 2018. En fait, ils ont distribué jusqu'à 85 milliards de dividendes pendant les années de la crise, soit 15 milliards de plus que pendant les années d'avant la crise, tandis que les salaires ont été réduits de 4,2 %. Aujourd'hui, 21,6 % de la population est menacée de pauvreté et d'exclusion sociale, et l'Espagne est le deuxième pays de l'OCDE qui compte le plus de personnes pauvres en âge de travailler. En outre, le taux d'emploi temporaire est de 26,8 %, alors que l'OIT met en garde contre l'énorme précarité de la situation, basée sur un marché du travail hautement tertiarisé (où le salaire moyen est la moitié de celui de l'industrie), qui est flexible et où l'exploitation du travail au détriment des droits des travailleurs est la norme.

Cette précarité est particulièrement ressentie par les femmes en raison de leur surcharge de travail en matière de tâches domestiques et de soins, l'écart salarial s'élevant à 30 %. Ainsi, la perte de pouvoir d'achat des travailleurs a été énorme, comme le montre la faible augmentation des salaires (0,1 %) par rapport à une inflation de 1,49 % en 2017.

Cette situation pour les pauvres contraste avec les grands gains des sociétés de l'IBEX-35. Ainsi, comme le souligne le rapport annuel n° 50 d'Intermón Oxfam sur la répartition inégale de la richesse et l'IBEX 35 (février 2019), les 20% de la population ayant les revenus les plus faibles sont aujourd'hui plus pauvres qu'il y a dix ans, alors qu'au contraire, les 20% ayant les revenus les plus élevés sont plus riches. Quant à la productivité dans les entreprises, elle a triplé, ce qui s'est accompagné d'une augmentation des salaires des cadres 5 fois supérieure à la moyenne : un cadre supérieur peut gagner 301 fois les salaires les plus bas d'une entreprise, et ce sans compter les sous-traitants et le multi-service.

Il en va de même si l'on considère les secteurs qui ouvrent la voie et demandent de l'aide et des facilités comme les compagnies aériennes Ryanair ou le groupe IAG dont fait partie Iberia (avec plus de 1,2 milliards d'euros de bénéfices sur les 9 premiers mois de l'exercice et plus de 2,8 milliards d'euros respectivement en un an !), l'industrie hôtelière ou la restauration rapide, dont les bénéfices au cours de la dernière décennie ont été maigres : en 2019, ils ont clôturé l'année avec une augmentation des ventes de 37 milliards d'euros, un chiffre très élevé et même inférieur à ceux de 2016 et 2017, où ils étaient encore plus rentables. Cependant, Burger King et autres marques de restauration rapide ont mis au chômage 22 000 personnes, et des hôtels comme Meliá ont déjà prévu la semaine dernière de licencier 240 personnes dans un hôtel des îles Canaries. Et à cela s'ajoute l'énorme précarité du secteur avec le multi-services, les sous-traitants, etc. Si, en temps de prospérité, ils n'ont pas partagé les profits, pourquoi veulent-ils maintenant partager les dettes ?

Nos vies et notre santé valent plus que leurs profits

Les données précédentes sur la crise du coronavirus montrent clairement que nous vivons dans un système économique profondément injuste, dans lequel la recherche d'un bénéfice maximal pour le petit nombre passe avant le bien-être social de la majorité. C'est la logique qui sous-tend les politiques de coupes qui, année après année, ont détruit nos services publics au profit du secteur privé, y compris la santé, dans le but de rembourser une dette publique que les riches et leur spéculation avaient générée. Les décès d'aujourd'hui sont le résultat du virus mais aussi de ces politiques qui ne nous permettent pas de nous occuper du nombre de malades qui arrivent chaque jour dans nos hôpitaux. N'oublions pas qu'en Espagne, la santé publique a été démantelée pendant des années jusqu'à ce que nous ayons 55 % des hôpitaux privés sur l'ensemble du territoire avec 33 % des lits existants et qu'aujourd'hui encore, ils ne s'occupent pas des malades.

Nous ne pouvons pas faire confiance à ceux qui nous gouvernent pour apporter des réponses aux conséquences de cette crise. Déen 2008 et jusqu'à présent, les différents gouvernements ont légiféré au profit des gens ordinaires sans se soucier de notre vie. Il n'en sera pas autrement à présent. Pedro Sanchez l'a dédit le vendredi 13 mars, en annonçant "un soutien à l'assouplissement des mécanismes d'ajustement temporaire de l'activité pour éviter les licenciements". Ce gouvernement, comme les précédents, appliquera une fois de plus une politique d'injection de fonds publics pour sauver les entreprises privées au lieu de prendre l'argent des gros profits pour maintenir l'emploi et les salaires des classes populaires. Il s'agit d'une décision politique que le gouvernement du PSOE-UP ne prendra pas non plus.

Il y a de l'argent, mais il faut le prendre là où il est. Ce n'est pas aux travailleurs de payer la crise! Nous devons construire une société où le bien-être de la majorité sociale est primordial et où les décisions sont prises par ceux d'entre nous qui produisent les richesses au quotidien. Les mesures prises face l'urgence sanitaire en ce moment montrent que ce sont toujours les intérêts des privilégiés qui prévalent.

Les exemples sont nombreux : alors que ceux qui nous gouvernent organisent des réunions virtuelles depuis une semaine, les travailleurs d'entreprises à forte concentration comme Amazon à Madrid, Mercedes-Benz à Vitoria, Airbus à Puerto Real ou Consentino à Almería sont toujours obligés d'aller travailler alors que ces entreprises ne produisent pas de biens de première nécessité. Il n'est pas vrai que nous sommes tous également exposés à ce virus. Alors que les footballeurs, les politiciens et les rois n'ont aucun problème à se faire tester pour le coronavirus, d'autres, comme les travailleurs de la santé, en sont privés pour éviter des pertes de vies humaines et parce que cela coûte beaucoup d'argent.

Face à cette situation, les directions des grands syndicats UGT et CCOO sont mises au service des employeurs et non des travailleurs. Dans l'accord signé, ils facilitent les licenciements sans aucune sorte de concession en retour. C'est inacceptable. La seule façon de mettre fin à ces inégalités est d'organiser les salariés pour faire respecter leurs droits.

Des mesures d'urgences !

Quelles sont les mesures d'urgences sociales à prendre pour que les riches payent cette crise ?
Depuis IZAR, nous considérons qu'il est nécessaire de mettre en œuvre des mesures urgentes pour éviter que les travailleurs ne payent pas la crise :
  • Interdiction des licenciements dans tous les secteurs. Qu'aucun travailleur ne soit licencié en raison du confinement. Pour éviter les licenciements, prenons l'argent des milliardaires, des dividendes et des paradis fiscaux.
  • Réadmission de tous les travailleurs licenciés.
  • Réduction du temps de travail sans réduction de salaire dans les secteurs considérés comme fondamentaux, afin de garantir les services, la santé et la sécurité.
  • Réquisition des services de santé privés sans compensation, pour les mettre au service de la santé publique et faire en sorte que cela se fasse dans toutes les provinces de l'État espagnol. Ne perdons plus de temps. Chaque heure qui passe, on enregistre plus de décès.
  • Mettre l'industrie pharmaceutique et la recherche médicale privée au service de la santé publique et encourager la collaboration internationale pour trouver un vaccin dans les plus brefs délais.
  • Fermeture des lieux de travail sans conséquences pour les travailleurs : personne ne doit travailler s'il ne s'agit pas de services indispensables. S'il est nécessaire d'éviter la contagion et de quitter la maison, cela ne peut pas se limiter au seul temps libre.
  • Création d'un impôt spécial pour les plus grandes fortunes et les bénéfices des entreprises dans le but de créer un fonds pour faire face à la situation.
  • Intervention sur les marchés et les supermarchés, élimination de la TVA sur les produits de première nécessité et contrôle de leur distribution. Réquisitionner les secteurs stratégiques nécessaires pour faire face à cette situation.
  • Régularisation des immigrants sans papiers afin qu'ils puissent accéder à l'aide, au chômage et à d'autres moyens de subsistance de base.
  • Interdiction des expulsions et de l'intervention des compagnies énergétiques, assurant l'approvisionnement, évitant les coupures et baissant les prix. Gel des loyers jusqu'à la normalisation de la situation et la mise en place d'un plan de location sociale pour amortir les conséquences de cette crise pour les travailleurs.
  • Mise en place de services pour couvrir les plus démunis, qui devraient être étendus lorsque la crise actuelle sera surmontée : logement social, ressources de base, insertion professionnelle...
  • Obliger les institutions financières à restituer l'argent public utilisé dans le sauvetage des banques (plus de 65 milliards d'euros). Création d'une banque publique sous contrôle social pour assurer la situation lorsqu'elle reviendra à la normale.
  • Non au paiement de la dette : abrogation de l'article 135 de la Constitution afin de mettre l'investissement dans les services publics et les besoins sociaux au premier plan.
  • Plan d'action spécial pour réduire la violence de genre dans l'environnement familial que cette situation d'enfermement dans le logement peut approfondir.
La crise du coronavirus ne sera pas payée par les travailleurs !

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