La crise sanitaire aura aussi été l’occasion de discréditer définitivement le ministre de l’Éducation nationale Jean-Michel Blanquer.
Très bon client des plateaux télé, il a noyé – avant et pendant le confinement – les élèves, leurs parents et les personnels sous une impressionnante série d’injonctions tellement absurdes que le plus souvent, elles ont été contredites quelques heures après par Macron, Philippe ou un autre membre du gouvernement.
L’ouverture coûte que coûte des écoles jusqu’au 16 mars
Au début de la crise sanitaire, Blanquer se sera avant tout illustré par son entêtement à nier la réalité de cette crise et le danger que faisait courir à tous l’ouverture des écoles, des collèges et des lycées.
Début mars, dans différents établissements, les cas de coronavirus se sont multipliés au sein de « clusters », comme dans l’Oise. Les personnels ont évidemment réagi en demandant la fermeture des établissements où des cas ont été dépistés. Face au mutisme de la hiérarchie et à la situation de danger grave et imminent, des personnels ont décidé d’exercer leur droit de retrait, comme au lycée Blaise Cendrars de Sevran (93) le 9 mars. Le ministère a alors montré son vrai visage, en refusant jusqu’au bout de reconnaître ces droits de retrait.
Blanquer défend l’image d’une Éducation nationale coûte que coûte au travail en pleine crise sanitaire. Avec le reste du gouvernement, il porte une énorme responsabilité dans la progression de la pandémie en ayant autant tardé à fermer les écoles et les établissements. Il était impossible de maintenir de quelconques « gestes barrières » dans des salles de classe ou des amphithéâtres !
Le 12 mars au matin, Blanquer a encore affirmé que « la fermeture totale des écoles n’a jamais été envisagée »... Mais le soir même, Macron l’a annoncée pour le lundi suivant.
Le maintien à tout prix d’une prétendue « continuité pédagogique »
Obligé de changer son fusil d’épaule en quelques heures, le ministre n’a rien trouvé de mieux à faire que d’affirmer que « tout [était] prêt pour assurer la continuité pédagogique »…
Aucune mise en place réglementaire du « télétravail », environnements numériques de travail (ENT) saturés et inaccessibles (à moins de se connecter la nuit !), invitation de la hiérarchie à utiliser des outils d’entreprises privées en dehors de tout cadre légal... C’est le rêve de Blanquer qui se réalise, celui d’un système scolaire dérégulé !
Pour les enseignants comme pour les élèves et leurs familles, c’est un cauchemar éveillé. Ne peuvent suivre les cours en ligne que les jeunes qui possèdent les outils informatiques nécessaires, ne sont pas malades, n’ont pas à s’occuper de leurs frères et sœurs, n’aident pas leurs parents dans une vie quotidienne confinée bien souvent difficile... Cela n’a pas empêché l’envoi de devoirs notés, voire des appels en ligne avec remontée à l’administration des noms des « absentéistes ».
Les résistances s’organisent, même à distance !
Les cadres d’auto-organisation hérités de la grève historique du bac en juin dernier, qui avaient été réactivés pour la bataille des retraites et la grève des E3C, ont été particulièrement utiles dans la période, des AG locales à la Coordination nationale de l’Éducation.
Alors que le syndicat majoritaire, la FSU, s’était empressé d’affirmer que les personnels allaient assurer la « continuité pédagogique »
– lesdits personnels remercient d’ailleurs les directions syndicales de s’engager en leur nom… –, une coordination à distance s’est réunie dès le 15 mars, à la veille de la fermeture. Elle a affirmé des
positions simples : refus de noter pendant la période de confinement, protections et conditions sanitaires pour les collègues accueillant les enfants des personnels soignants ou droit de retrait dans le cas contraire… Des revendications de bon sens, comme la suite l’a malheureusement prouvé : des écoles accueillant des enfants de soignants ont dû être fermées suite à la multiplication de cas de coronavirus.
Les AG et coordinations à distance ont permis de dénoncer le scandale des fermetures de classes annoncées en plein confinement – alors que les profs ne peuvent ni manifester, ni faire grève –, de lancer une campagne en ligne contre la vague impressionnante de répression des grèves du bac Blanquer et d’exiger l’obtention du bac pour toutes et tous. Ces cadres militants ont également permis de réagir rapidement au sujet du déconfinement annoncé.
Rouvrir les écoles pour faire reprendre le travail
Macron ose utiliser le prétexte des inégalités scolaires pour justifier la réouverture des écoles le 11 mai. Sa décision n’obéit ni à des considérations pédagogiques, ni à des considérations sanitaires. Son seul objectif est de faire garder par les enseignants les enfants des travailleuses et travailleurs qui doivent retourner au boulot, pour faire marcher la machine à profits.
Pour le président de la Fédération des médecins de France, cette réouverture « fait courir un risque inutile ». Blanquer a beau bricoler un étalement de la reprise sur trois semaines, cela ne change rien au problème. Tant qu’il n’y aura pas de tests et de masques, tant qu’il n’y aura pas de moyens de faire respecter les « gestes barrières » et la distanciation sociale (impossibles à respecter, même à 15 par classe), il est hors de question d’accepter une réouverture des écoles. D’ailleurs, de nombreux personnels ont d’ores et déjà annoncé qu’ils feraient usage de leur droit de retrait si le gouvernement persistait. Cette question qui se pose dans l’Éducation nationale, se pose en réalité pour tous les salariés obligés de se rendre sur leur lieu de travail. Et si le 11 mai devenait la journée du droit de retrait ?
David 92