Depuis plus d'une semaine, pour ceux et celles qui n'étaient pas déjà forcés de se rendre au travail et dont l'activité ne peut continuer à distance, la reprise est lancée : reprise du boulot, reprise des trajets entassés dans les transports en commun... Mais pas reprise des relations sociales ou des luttes !
Si l'on peut se retrouver confiné avec des dizaines de personnes dans l'espace clos d'un bus ou d'un métro, puis côtoyer ses collègues dans un respect plus que douteux de la distanciation et des gestes barrière, hors de question en revanche de se retrouver en plein air pour manifester !
Les derniers de cordée en première ligne
Des rassemblements ont bien eu lieu dès le 11 mai. À Rouen, les travailleurs et travailleuses ont manifesté, en restant à distance les uns et les unes des autres, contre la reprise des activités non essentielles et dans des conditions dangereuses, pour de véritables moyens dans la santé et contre les attaques qui visent le droit du travail. À Toulouse, plusieurs centaines de personnels soignants ont manifesté (là encore avec respect des distances, masques et gel hydroalcoolique) pour la réquisition de masques FFP2 et FFP3, la réouverture des lits fermés, la création d’un nouvel hôpital, 1500 embauches au CHU, la revalorisation des carrières... Tout comme à Saint-Étienne ou, jeudi 14 mai, à l'hôpital Robert Debré de Paris. À l'Île-Saint-Denis et dans plusieurs quartiers populaires, des rassemblements s sont tenus contre le racisme et les violences policières...
Les autorités n'ont pas tardé à répondre à ces revendications de base... en interdisant les manifestations, comme celles des Gilets jaunes ou des collectifs pour le climat, prévues à Angers, Lyon, Montpellier ou encore Nantes. Samedi, à Paris, la police a interpellé deux manifestants et en a verbalisé dix. Ces interdictions étaient fréquentes avant la crise sanitaire, mais elles peuvent maintenant prétexter de la santé publique. C'est plus facile que d'inspecter les lieux de travail pour y vérifier le respect des règles d'hygiène !
La colère de notre camp social ne peut plus rester confinée et le gouvernement le sait. C'est bien pour cela que des procédures de répression de militants et de militantes interrompues en mars reprennent dès maintenant. À Melle (86), trois enseignant et enseignantes suspendus pour avoir soutenu leurs élèves mobilisés contre la réforme du bac en février, ont été auditionnés le 15 mai dans le cadre d'une enquête administrative. La SNCF relance des procédures contre cinq cheminots de la gare de l'Est et un de Saint-Lazare, qui risque le licenciement si la ministre Pénicaud donne son accord...
Un gouvernement plus cynique que jamais
Le confinement a rappelé à toute la société qui étaient ceux et celles qui la faisaient tourner : les travailleurs et travailleuses de la santé, des transports, de l'industrie, de l'éducation... Logique pour la classe dominante de les réprimer avant que les « premières lignes » de la crise sanitaire ne deviennent les fers de lance d'une remise en cause de l'ordre établi !
Ces tentatives d'intimidation doivent renforcer notre détermination à faire valoir nos droits et notre juste place dans la société. Dans l'éducation, où le ministre fait croire à une reprise des écoles alors que seule une poignée d'élèves est accueillie (et évidemment pas en premier lieu les enfants en décrochage ou issus des quartiers populaires), nombre d'enseignants et d'enseignantes dénoncent des protocoles sanitaires au rabais, refusent de revenir ou font valoir leur droit de retrait. Lundi 18 mai, Blanquer reconnaissait 70 cas de coronavirus dans les écoles. Le même jour, un recensement effectué par le collectif enseignant des Stylos rouges, donc forcément incomplet, affichait déjà 116 écoles et collèges touchés, parfois seulement après les réunions de prérentrée des professeurs !
Les directions syndicales nationales ne donnent aujourd’hui pas de perspective commune de lutte, de grève, de manifestation. Pourtant, ce serait bien le moment de s'y mettre ensemble : face aux mensonges et au cynisme du gouvernement, nous ne devons avoir aucun complexe à exprimer nos colères et à les regrouper. Nous n'avons à payer ni les erreurs des dirigeants, ni la crise à venir !